Après une occasion manquée en 2020, 2021 sera-t-elle l’année de la biodiversité ? La France a donné le coup d’envoi le 11 janvier de la mobilisation internationale, dans l’espoir d’aboutir à un cadre ambitieux pour la prochaine décennie lors de la COP15 en Chine.
2020 devait être marquée par plusieurs événements d’importance : le congrès mondial de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), qui se déroule tous les quatre ans, et la COP15 biodiversité en Chine. Mais l’épidémie de Covid-19 a chamboulé cet agenda. La 15e réunion de la Convention de l’ONU sur la diversité biologique (COP15) est cruciale. Elle doit aboutir à un nouveau cadre pour protéger les écosystèmes et gérer durablement les ressources naturelles à moyen terme, 2030, et plus long terme, d’ici 2050.
« Commencer l’année 2021 avec ce One planet summit est très important car c’est l’année de la réconciliation de tous nos défis« , a insisté lundi 11 janvier le président de la République Emmanuel Macron, en accueillant une conférence sur la biodiversité à Paris, en partie en visio-conférence. 2021 verra se succéder le congrès de l’UICN à Marseille en septembre, la COP26 climat à Glasgow en novembre, la COP sur la désertification. La COP15 est annoncée pour mai 2021, mais pourrait être décalée à l’automne, en fonction de la situation sanitaire.
Au cours des derniers mois, avant même que les négociations entrent dans le vif du sujet, de premières divergences sont apparues entre les quelque 140 pays partenaires. En novembre, le Brésil a tenté de bloquer, en vain, le budget 2021 de la Convention pour la biodiversité. Des représentants de peuples autochtones ont fait connaître leur réticence face à l’objectif de protéger 30% des terres et océans, compris dans les négociations. Ils craignent qu’il se fasse au détriment de leurs droits. « C’est une inquiétude tout à fait légitime« , répond Basile van Havre, co-président des négociations, qui estime toutefois que s’opposer à cet objectif de protection serait « une mauvaise solution à un problème réel« .
D’autres parties prenantes s’inquiètent de la suppression de l’objectif de 10% des terres et des océans placés en stricte protection dans la dernière version du texte en discussion. « Nous allons nous battre pour que ce point soit de retour dans le texte« , promet Yann Wehrling, ambassadeur de la France pour l’environnement. Paris, le Costa Rica et le Royaume-Uni animent la « coalition de la haute ambition« , qui regroupe une cinquantaine de pays engagés à protéger au moins 30% de la surface du globe d’ici 2030.
Pour l’ONG WWF, « ce que nous avons sur la table n’est pas assez ambitieux ni exhaustif pour inverser la perte de biodiversité d’ici 2030« , regrette, auprès de l’AFP, Guido Broekhoven. Il faut « identifier les secteurs entraînant cette perte de biodiversité, dont les systèmes alimentaires et agricoles, forestiers, la pêche, les industries extractives » et « fixer des cibles spécifiques pour ces secteurs« , avance-t-il. Autre nécessité : réduire « l’empreinte de notre production et de notre consommation » et améliorer les dispositifs de contrôle de mise en œuvre des mesures adoptées, poursuit-il.
Pour autant, « tout ce temps n’a pas été perdu« , estime Aleksandar Rankovic, expert à l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri). Il a permis à des acteurs non étatiques de se mettre en ordre de bataille. « Mais sur l’objectif final qui est d’aboutir à un texte, il est difficile de capitaliser sans négociations« , reconnait-il. Basile van Havre défend une « stratégie des petits pas » en attendant la reprise des discussions en présentiel. Le changement d’administration aux États-Unis est aussi une bonne nouvelle, même si Washington n’a pas ratifié la Convention pour la biodiversité, souligne-t-il. En 2021, « ce sera quitte ou double« , avertit Yann Wehrling : soit les efforts seront moindres pour la biodiversité, soit « il y aura une prise de conscience des liens entre les atteintes à l’environnement et des maladies comme la Covid-19« .