Petit quizz pour vérifier votre connaissance de l’actualité : parmi les affirmations suivantes, laquelle est vraie ?
a – Le président d’Orpéa a été nommé délégué interministériel chargé du grand âge et de la fin de vie.
b – Le PDG des laboratoires Servier a été nommé président de l’Agence nationale de sécurité du médicament.
c – Le président des industriels du bois a été nommé délégué interministériel chargé de la forêt et du bois.
d – Le président de Monsanto a été nommé directeur de l’Agence d’évaluation des pesticides.
e – Nordahl Lelandais a été nommé ministre de la Justice.
Vous hésitez ? C’est normal. Les propositions a, b et d, tout aussi fantaisistes que la e, ne sont guère plus choquantes ni moins vraisemblables que la c, qui est elle parfaitement exacte.
En toute discrétion, Jean-Michel Servant a été nommé la semaine dernière « délégué interministériel à la forêt, au bois et à ses usages ». Lui-même exploitant forestier en dans le Poitou, il était la veille encore de sa nomination le président de France-Bois-Forêt, qui fédère les industriels du bois et assure auprès des pouvoirs publics un lobbying efficace au bénéfice de l’exploitation effrénée des forêts. Il y a quelques semaines, M. Servant menait une campagne acharnée contre la proposition de loi d’une députée de la majorité, Sophie Panonacle, qui visait à encadrer les coupes rases : fortement décriée par les associations environnementales, cette pratique consiste à couper l’ensemble d’une parcelle d’un coup pour replanter ensuite de nouveaux arbres. Les forestiers respectueux de la nature préfèrent, eux, une gestion différenciée de leurs parcelles, qui laisse cohabiter des arbres d’âges différents, y compris de très vieux (des « îlots de sénescence ») où toute une cohorte d’espèces essentielles à la régénération de la forêt -insectes, oiseaux, champignons- trouvent le gîte et le couvert.
M. Servant est délégué auprès des ministres de l’économie, de l’agriculture, de l’intérieur et de l’écologie (dans cet ordre). Au regard de son CV, s’il avait été nommé à la place de l’un de ces ministres, M. Servant aurait dû se déporter de tous les dossiers concernant la forêt et le bois, au titre de la prévention des conflits d’intérêt. Mais comme il est le délégué de tous ces ministres à la fois, qu’il aura autorité sur leurs services et leurs administrations, il pourra s’occuper à plein temps de ce sujet, sans que personne ne trouve rien à y redire.
C’est sans doute de que, dans la novlangue de bois macronienne, on appelle un circuit court.