Un nouveau partenariat mis en place par le gouvernement Norvégien permet de fournir des images de l’évolution des forêts tropicales afin d’observer et d’anticiper la déforestation. Une étude publiée dans le journal Nature suggère que le réchauffement climatique libère beaucoup plus de carbone des sols tropicaux qu’estimé auparavant. En parallèle, d’autres recherches montrent les zones à reboiser pour lutter plus efficacement contre le changement climatique.
Le ministère norvégien du Climat et de l’Environnement a conclu un contrat de 43,5 millions de dollars avec trois groupes de technologie de surveillance par satellite : Kongsberg Satellite Services, Planet et Airbus. Ce contrat permet d’offrir un accès à des images satellites des forêts tropicales afin de mieux agir pour leur protection. Le contrat prévoit un accès libre aux images à tous. Cela permettrait aux ONG, aux communautés locales, aux gouvernements, entreprises et particuliers de visualiser les changements dans les forêts et par conséquent de mieux comprendre ce qui se passe sur le terrain.
L’agriculture, le développement des infrastructures, les incendies, l’exploitation minière et l’étalement urbain ont fait des ravages dans les forêts tropicales au cours des 40 dernières années. Les images jusqu’à présent enregistrées dévoilent qu’une superficie de forêt presque aussi grande que l’Europe a été détruite. En 2019, une zone de forêt primaire de la taille d’un terrain de football a été abattue toutes les 6 secondes. Ce nouveau partenariat va fournir des images de qualité 10 fois supérieures à celles proposées par le premier programme d’observation Landsat lancé en 1960. L’idée est de fournir un maximum de données aux ONG, communautés locales, gouvernements et entreprises pour qu’ils puissent agir contre la déforestation et ainsi lutter contre le changement climatique.
Il est traditionnellement imaginé que les forêts représentent un allié puissant dans la lutte contre le changement climatique grâce à la capacité des végétaux de capturer le CO2 émis par l’homme. Une étude parue dans le journal Nature suggère qu’un climat plus chaud pourrait libérer beaucoup plus de carbone des sols tropicaux qu’estimé auparavant. Par conséquent, en plus des émissions de CO2 émises par l’homme, les forêts tropicales deviendraient de nouveaux contributeurs au réchauffement de la planète, une fois un certain seuil climatique atteint. Les chercheurs ont construit des dispositifs de chauffage pour augmenter artificiellement la température du sol dans une forêt tropicale de plaine au Panama. Ils n’ont prédit qu’une perte modeste de carbone des sols tropicaux, mais ont été surpris de constater une augmentation des émissions de carbone de 55 % sur deux ans lorsque ces sols étaient chauffés à quatre degrés Celsius. Les auteurs notent que les sols tropicaux sont plus sensibles au réchauffement à court terme que ce qui a été reconnu précédemment mais que pour autant, ils ont des raisons de croire que la libération de carbone ne se poursuivra pas indéfiniment au même rythme élevé.
En parallèle, une autre étude publiée dans le journal Nature rassure sur le rôle des forêts dans la lutte contre le changement climatique. Elle révèle que le groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) avait sous-estimé les taux de séquestration potentielle du carbone par les forêts. Jusqu’à 2,43 milliards de tonnes de carbone pourrait être absorbé grâce à la régénération de ces espaces. Cela signifie que la reforestation pourrait être un moyen plus puissant de lutter contre le changement climatique qu’on le supposait auparavant.
Les recherches effectuées aident à comprendre où la régénération naturelle des forêts a le plus de sens en tant qu’outil de lutte contre le dérèglement climatique. Elles donnent des précisions sur la quantité de carbone que les forêts régénérées peuvent absorber et indiquent les zones qu’il faut favoriser en priorité pour un reboisement efficace.
Les chercheurs ont cartographié les pays où la régénération naturelle des forêts a le potentiel d’être une solution climatique naturelle efficace et surtout rentable. La Chine, le Brésil et l’Indonésie auraient la plus grande capacité de séquestration du carbone, suivis de près par les États-Unis, la Russie, l’Inde et la République du Congo.
L’étude conclut que le potentiel maximal d’atténuation du climat par le reboisement (2,43 milliards de tonnes de carbone absorbé) est inférieur de 11 % à ce qui avait été estimé précédemment. Les auteurs de l’étude ont calculé que pour atteindre ce chiffre, il faudra de grands changements tels que la diminution drastique voire l’abandon de la viande dans le régime alimentaire mondial. Selon eux, cela permettrait de rendre leurs forêts aux terres précédemment utilisées pour les pâturages et l’alimentation du bétail.
Étude : Perte de carbone du sol par réchauffement expérimental dans une forêt tropicale