Dans le cadre de l’alimentation mondiale et de l’émergence de sources de nourriture alternative, une étude fait le point sur les qualités nutritionnelles des insectes, en prenant pour exemple les larves de charançon de palmier.
Les insectes, une source de nourriture alternative pour le futur ? En tout cas, des travaux menés au Cameroun par une équipe où s’associent l’Institut national de la recherche agronomique (Inra), l’université de Yaoundé 1 et l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD), affirment que, sauvages ou élevées, les larves dodues de plusieurs espèces présentent d’importants bénéfices nutritionnels pour ceux qui les consomment. « Dans un scénario d’insécurité alimentaire d’ici 30 ans évoqué par la FAO, elles pourraient constituer une source de nourriture alternative et complémentaire… », explique l’IRD dans un communiqué. Les scientifiques se sont penchés sur le cas des larves de charançon de palmier, disponibles toute l’année et récoltées à l’état sauvage sur des raphias morts ou dans le cadre de semi-élevages, sur des raphias abattus à cet usage, par exemple au Cameroun. « Ces larves sont déjà consommées dans toute la zone intertropicale, qu’il s’agisse de l’Amérique, de l’Afrique, de l’Asie ou de l’Indonésie , raconte Philippe Le Gall de l’unité Évolution, génomes, comportement et écologie. Avec les termites et les chenilles de papillon de nuit, elles font partie du top 3 des insectes les plus appréciés. » Seulement, l’impact de ces récoltes sur l’environnement est important, puisque de nombreux raphias sont abattus. Aussi l’IRD, le Centre de Recherche Forestiere Internationale (CIFOR) et une association camerounaise, LIFT, ont-ils développé une ferme d’élevage de larves où une simple tige de raphia dans une boîte produit 276 larves de charançon, soit huit fois plus que la méthode traditionnelle.
La composition nutritionnelle des larves a par ailleurs été étudiée, en distinguant les blanches et les jaunes. « Ces deux morphotypes existent à l’état naturel, et bien qu’ils soient vendus à des prix et sous des noms différents, il s’agit de la même espèce, précise Philippe Le Gall. L’analyse de séquences ADN l’a prouvée. » Elles vivent toutefois sur des types de raphias différents. Côté nutrition, les larves sauvages, plus grandes, et les larves jaunes, contiennent plus de lipides que les larves d’élevage et blanches. Les jaunes sont ainsi plus énergétiques. « En revanche, le profil des lipides est le même dans les trois groupes étudiés : il s’agit d’oméga-3 et d’acide linoléique, des acides gras insaturés, recommandés par les nutritionnistes ! », précise Philippe le Gall. En lien avec le LIFT, Philippe Le Gall continue ses travaux pour explorer les possibilités d’exploiter les charançons en tant que ressource alimentaire : mise au point de croquettes moitié farine de maïs-moitié farine d’insectes pilés ; étude de farine de larves pour la pisciculture… Par ailleurs, une unité pilote de transformation est en cours d’installation à Yaoundé, au Cameroun.