🔻 Protéger les océans : une solution aux crises du climat, de l’alimentation et de la biodiversité

Photo d'illustration ©joakant de Pixabay

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Une étude publiée dans la revue Nature montre que si certaines zones océaniques étaient protégées, cela permettrait d’atténuer les effets du changement climatique et de préserver la biodiversité tout en offrant une meilleure productivité des pêcheries.

Et si les crises actuelles – comme la crise du climat, de l’alimentation et de la biodiversité – pouvaient se résoudre par un seul et même facteur commun : la protection des océans ? Une équipe de recherche internationale a cartographié pour la première fois les zones océaniques qui, si elles étaient protégées, permettraient d’atténuer les effets des enjeux climatiques et de biodiversité tout en améliorant la productivité des pêcheries. Les scientifiques expliquent qu’une protection bien ciblée des océans pourrait aider à relever les défis les plus urgents de l’humanité.  « La vie dans les océans décline à travers le monde à cause de la surpêche, de la destruction des habitats et du changement climatique. Seulement 7% des océans est actuellement protégé« , constate Enric Sala, auteur principal de l’étude.

L’équipe qui comprend des chercheurs de l’Université de Montpellier, de l’Ifremer (Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer) et du CNRS (Centre national de la recherche scientifique) a identifié des zones qui, une fois protégées, permettraient de sauvegarder plus de 80 % des habitats d’espèces marines menacées, alors que la couverture actuelle est inférieure à 2%. Les auteurs ont également remarqué que les zones prioritaires à protéger sont réparties sur l’ensemble du globe, dans les zones économiques exclusives des pays. Afin d’identifier ces zones les scientifiques se sont dans un premier temps focalisés sur les aires marines non protégées et y ont évalué le degré d’impact des activités humaines. Ils ont ensuite estimé le niveau d’impact positif que pourrait entraîner la protection de ces zones. Pour finir, ils ont mis au point un algorithme permettant d’identifier les zones où des mesures de protection seraient les plus avantageuses pour générer divers bénéfices : protéger la biodiversité, augmenter la production de ressources alimentaires marines et diminuer les émissions de gaz à effet de serre.

En Europe, « la mer Adriatique, l’Irlande, la Grande-Bretagne et la mer du Nord sont des zones où des aires totalement protégées apporteraient des bénéfices multiples« , indique Enric Sala à l’AFP. En terme de biodiversité, il cite « la côte Atlantique française, le pourtour de la péninsule ibérique et les îles Baléares » comme prioritaires. Les auteurs ont aussi identifié comme zones prioritaires à protéger la dorsale médio-atlantique, une chaîne de montagnes essentiellement subaquatique, le plateau des Mascareignes dans l’Océan Indien, la dorsale de Nazca sur la côte ouest de l’Amérique du Sud et la dorsale sud-ouest indienne entre l’Afrique et l’Antarctique. « Ces chaînes de montagne sous-marines contiennent une biodiversité unique et irremplaçable, menacée par la pêche, principalement le chalut« , indique Enric Sala.

« Le résultat le plus marquant et le plus encourageant est le gain énorme (90 %) que nous pouvons obtenir pour la conservation de la biodiversité en protégeant seulement 21 % de l’océan, si nous choisissons soigneusement l’emplacement des aires marines strictement protégées », explique David Mouillot, co-auteur de la publication dans un communiqué de presse de la Fondation pour la Recherche sur la Biodiversité (FRB). Les résultats de l’étude apportent son lot de connaissances supplémentaires sur les bénéfices multiples de la conservation des océans. Les chercheurs soulignent qu’une protection ciblée et accompagnée de mesures comme l’interdiction de la pêche au chalut pélagique – technique qui dégrade les fonds sous-marins – contribuerait à la séquestration du carbone. Les fonds sous-marins étant le plus grand réservoir de carbone au monde, il est important de les laisser intactes. Ils précisent par ailleurs que les aires marines protégées judicieusement placées et interdisant la pêche stimuleraient la production de poissons et donc, contre toute attente, l’industrie. Les prises de pêche pourraient ainsi augmenter « de plus de huit millions de tonnes« .

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