Une récente étude menée sur l’île de Honshu au Japon suggère de concentrer les efforts de conservation des prairies sur les plus anciennes parcelles, où la biodiversité est plus riche. Les auteurs notent également que le développement des stations de ski ont eu un impact positif sur ces prairies.
Les prairies sont des écosystèmes dynamiques qui réagissent rapidement aux changements et fournissent des services importants. Elles nourrissent les cheptels, capturent le carbone présent dans l’atmosphère et le séquestrent dans les sols, filtrent les polluants de l’eau et constituent un habitat propice à des espèces rares et endémiques ainsi qu’aux pollinisateurs. Les prairies sont cependant de plus en plus menacées par l’homme, en particulier par les changements d’utilisation des terres : elles disparaissent avec la déprise agricole et la croissance urbaine. Une récente étude réalisée sur l’île principale du Japon, Honshu, et publiée dans la revue Ecological Research suggère de concentrer les efforts de conservation sur les prairies plus anciennes qui présentent une biodiversité plus riche.
Selon les auteurs les nouvelles prairies ont moins de 70 ans, alors que les anciennes ont entre 160 et des milliers d’années d’âge. En comparant les anciennes et les nouvelles prairies du Japon, l’étude estime qu’il pourrait être utile de donner la priorité à la conservation des plus anciennes, car elles présentent une biodiversité plus grande. Certaines des plus vieilles prairies sont d’importants refuges pour les organismes venus au Japon pendant la période glaciaire, lorsque cet écosystème était beaucoup plus étendu en Asie. Les refuges sont des habitats qui permettent à certaines espèces de survivre pendant de longues périodes, même face à des conditions environnementales changeantes. L’étude rapporte qu’il est très important de sauvegarder ces espaces pour maintenir la biodiversité. Il y a un siècle, les parcelles riches en faune et flore représentaient environ 13 % de la superficie contre seulement 1 % au début des années 2000.
Depuis 2001, environ la moitié des prairies naturelles du monde ont été converties en terres agricoles. L’agriculture est la plus grande menace pour ces écosystèmes. Pour autant, l’étude rappelle que toutes les interventions humaines n’ont pas été négatives. En effet, certaines prairies japonaises, considérées comme semi-naturelles, sont entretenues par les hommes au travers des techniques de fauchage, de feux ou de la création de pâturage pour le bétail. Ces activités humaines stoppent le développement des communautés végétales sur une longue période et empêche les prairies semi-naturelles de devenir des forêts. Ce phénomène menacerait les espèces végétales qui ont besoin d’un ensoleillement important pour pousser et d’un espace suffisant pour disperser leurs graines.
Au Japon, les prairies ont également, et de façon plus surprenante, tiré profit de la passion grandissante des habitants pour le ski, d’après les chercheurs. Les stations de ski ont converti les prairies en pistes à partir de 1923. Cinq ans plus tard, le Japon accueillait les Jeux Olympiques d’hiver, ce qui n’a fait qu’augmenter l’attrait du public pour le ski. Dans les années 1960, les forêts ont été coupées pour créer des pistes, créant de nouvelles prairies semi-naturelles. Les pistes de ski soigneusement entretenues ont dès lors offert un refuge inattendu à certaines des plantes patrimoniales du Japon, comme l’Angélique pubescente. Cependant, les auteurs remarquent que la perte d’intérêt progressive des Japonais pour les sports d’hiver conduit à la fermeture de plusieurs stations de ski, et ainsi au déclin des prairies. Les auteurs expliquent que le rétrécissement de ces espaces engendre une perte d’habitat pour les pollinisateurs et pour certaines espèces de papillons indispensables aux plantes à fleurs rares et endémiques présentes à Sugadaira, au nord-ouest de Tokyo.