Une étude épidémiologique montre que le régime alimentaire des grands consommateurs de bio est plus sain au plan nutritionnel, moins impactant pour l’environnement, réduit l’exposition aux pesticides de synthèse mais coûte plus cher à l’achat.
Une approche épidémiologique multi-critères, menée dans le cadre du projet BioNutriNet, a croisé le niveau de bio dans l’alimentation avec différents indicateurs de la durabilité. Elle montre que le régime alimentaire des grands consommateurs de bio est dans son ensemble plus sain au plan nutritionnel, globalement moins impactant pour l’environnement, réduit l’exposition aux pesticides de synthèse mais coûte plus cher à l’achat. Une grande partie des bénéfices (moindre émission de gaz à effets de serre, moindre usage des sols,) est liée à la part plus importante de produits végétaux dans leur alimentation, alors que la présence plus forte de produits bio dans le régime permet un niveau plus faible d’exposition à des contaminants chimiques. Ces résultats sont publiés le 15 avril 2019 dans la revue American Journal of Clinical Nutrition.
La recherche menée par l’Inra et ses partenaires (ITAB, Inserm, Bio Consom’acteurs, CHU Grenoble, Solagro, Cnam, Université Paris13) porte sur plus de 29 000 participants adultes mobilisés dans le cadre du projet français BioNutriNet, piloté par l’équipe de Recherche en Epidémiologie Nutritionnelle, une unité mixte de recherche rassemblant l’Inra, l’Inserm, le Cnam et l’Université Paris 13. Elle a associé des nutritionnistes, des économistes, des toxicologues, des agronomes et des spécialistes de l’environnement. Des données précises relatives à la consommation d’aliments bio et conventionnels ont été collectées en 2014 à l’aide d’un questionnaire de fréquence alimentaire semi-quantitatif portant sur 264 items alimentaires et une échelle de fréquence de consommation de bio. Des informations sur le mode de vie, les lieux d’achat du bio et l’indice de masse corporelle ont également été collectées.
Dans l’échantillon considéré, après redressement sur la structure sociodémographique française, 20% des participants n’étaient pas consommateurs de bio, alors que 20% en consommaient au moins 50% (moyenne = 71%). Les résultats de l’étude ont montré que les grands consommateurs de bio ont des habitudes alimentaires particulières, caractérisées par une part plus importante de végétaux dans leur alimentation (le rapport protéines végétales / animales est de 14.29 contre 0,46 pour les « non-bio » et des apports plus faibles en viande rouge -51% et de produits laitiers (-38 %), mais aussi des apports énergétiques sensiblement plus élevés (2115 Kcal / jour contre 2040 Kcal / jour).
De ce fait, le régime alimentaire observé chez les grands consommateurs de bio est nutritionnellement plus sain, et apporte plus de nutriments.
Le coût de l’alimentation est plus élevé pour les grands consommateurs de bio : il est de 8,8 €/ jour en bio vs 7.0 €/ jour en « non-bio ».
Le régime alimentaire des grands consommateurs de bio est moins impactant pour l’environnement en termes d’émissions de gaz à effet de serre (GES): 3.17 contre 5.07 kg CO2eq/jour, de consommation d’énergie primaire : 14.67 contre 19.72 MJ/jour et d’occupation des sols agricoles: 9.51 contre 12.35 m²/jour nécessaire.
Les modèles de décomposition ont permis d’analyser la contribution de la structure du régime alimentaire (fruits, légumes, viandes etc.) et du type d’aliment (bio ou conventionnel) aux effets observés. Les résultats ont mis en évidence que la structure du régime alimentaire (plus végétal) était principalement responsable de la diminution des GES et de l’occupation des terres pour la production agricole, observée chez les consommateurs de bio. A l’inverse, la diminution de la consommation d’énergie primaire était liée au mode de production bio.
L’exposition aux résidus de pesticides de synthèse par l’alimentation était, selon les molécules, entre -23 et -100% inférieure pour les grands consommateurs de bio (sauf pour le spinosad et les pyréthrines naturelles autorisés en bio). La réduction de l’exposition (- 40% en moyenne) aux contaminants chimiques est expliquée par le mode de production bio, alors que la structure du régime (riche en fruits et légumes) tend à augmenter l’exposition aux pesticides.
Le Haut Conseil de la Santé Publique (Ministère de la Santé) français a recommandé en 2017 2018 une alimentation plus végétale, en préférant les aliments végétaux à teneur réduite en contaminants, et l’un des objectifs de santé publique est d’aboutir à au moins 20% d’aliments bio en restauration collective.