Une nouvelle étude montre que la mer se vide de ses prédateurs, qui se regroupent principalement sur des récifs isolés et des monts sous-marins situés à plus de 1 250 km des ports de pêche et encore peu protégés.
Aujourd’hui, à travers l’exploitation de 55 % des zones océaniques du globe, le volume de la pêche industrielle représente plus de 80 millions de tonnes, contre 20 millions en 1950. Les aires marines protégées (AMP), qui représentaient en 2015 3,4% de la surface des océans, sont parmi les dernières zones maritimes où la pêche est interdite, et la biodiversité, protégée. Les connaissances sur la distribution globale de la faune marine sont toutefois limitées, et les données sur l’abondance des prédateurs font défaut. Des scientifiques dirigés par la Société Zoologique de Londres (ZSL), en partenariat avec l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD) et co-financés par la Fondation pour la Recherche sur la biodiversité (FRB) se sont penchés sur la question en analysant le nombre d’espèces, la taille et l’abondance de plusieurs prédateurs marins dans les océans Indien et Pacifique entre 2012 et 2015, à l’aide de systèmes vidéo avec appâts sur plus de 1 000 sites. [ihc-hide-content ihc_mb_type= »show » ihc_mb_who= »1,2,3,4,5″ ihc_mb_template= »1″ ]
Les résultats démontrent que, « bien que la richesse des espèces ne soit pas impactée par les activités humaines, la taille du corps et l’abondance des requins sont fortement corrélées avec la distance aux pressions anthropiques et notamment l’éloignement du port de pêche« , commente la FRB dans un communiqué. La plupart des caméras situées dans des sites proches d’activités humaines n’ont pas enregistré la présence de prédateurs, il semble que « le nombre de requins diminuait de moitié dans les mers les plus proches des villes de plus de 10 000 habitants. » Les prédateurs, notamment les plus gros individus, se concentrent dans des récifs isolés et des monts sous-marins situés à plus de 1 250 km des ports. Toutefois, l’étude souligne que ces derniers refuges sont paradoxalement peu couverts par le réseau d’AMP et attire l’attention sur la « nécessité d’établir de nouvelles stratégies prenant en compte les habitats préférentiels des prédateurs marins, essentiels au maintien de la biodiversité dans nos océans et du fonctionnement des systèmes océaniques« , en établissant de nouvelles AMP dans les monts sous-marins éloignés. L’auteur principal de l’étude, Tom Letessier, affirme que « seulement 13 % des océans de la planète peuvent maintenant être considérés comme ‘sauvages’, mais les requins et autres prédateurs sont beaucoup plus abondants et plus grands à des distances supérieures à 1 250 km des activités humaines. Cela suggère que les grands prédateurs marins sont incapables de prospérer à proximité des populations humaines et constitue un autre exemple clair de l’impact de la surexploitation humaine sur nos mers. »
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