Une étude menée sur une population de rats bruns d’un parc de la région parisienne démontre que plus de la moitié sont génétiquement résistants aux raticides et qu’ils sont porteurs en outre de nombreux parasites dont certains sont transmissibles à l’homme.
Des chercheurs français ont souhaité en savoir plus sur le rat des villes, animal nuisible très prolifique même si certains dessins animés l’ont présenté de façon fort sympathique. Ils se sont intéressés aux rats surmulots (Rattus norvegicus) du parc départemental de Chanteraines qui s’étend sur 82 hectares dans les Hauts-de-Seine. Il a d’abord fallu les capturer. « C’est très compliqué d’attraper des rats vivants dans les villes car ils ont beaucoup de ressources, donc ils ne s’intéressent pas forcément aux pièges »et de plus ils sont méfiants, indique mardi Gwenaël Vourc’h, chercheuse à l’Institut national de la recherche agronomique (INRA). Finalement les scientifiques sont parvenus à prendre 86 rats, des deux sexes et de tous âges. Les surmulots ont été euthanasiés pour permettre leur examen. Alors que le règlement intérieur du parc interdit l’utilisation de raticides, les scientifiques ont mis en évidence des résidus de ces produits dans le foie de la moitié des rats (48%), selon l’étude publiée dans PlosOne. Et 56% des rats se sont révélés génétiquement résistants aux raticides couramment utilisés pour contrôler les populations de rongeurs, poursuit l’étude menée par des chercheurs de l’Inra, de VetAgro Sup et de l’Institut Pasteur. « Ces éléments laissent notamment supposer que des rats rejoignent le parc depuis l’extérieur où ils ont pu consommer des raticides », souligne l’Inra. Très adaptable, le rat est également un vecteur potentiel de nombreuses maladies. Les chercheurs ont identifié 16 genres parasitaires différents chez les rats examinés: « huit espèces de vers, trois espèces de puces, un protozoaire et quatre genres bactériens », égrène l’Inra. La grande majorité des rats (88%) abritent au moins deux parasites. Sept parasites sont potentiellement responsables de maladies chez l’homme et les animaux. Les chercheurs ont notamment identifié le ver plat Hymenolepis diminuta (ténia du rat), la bactérie Francisella tularensis (agent de la tularémie) ou encore des bactéries du genre Leptospira responsables de la leptospirose et dont le rat est le principal réservoir. Ce qui pose « la question de la potentielle transmission de ces maladies aux personnes – notamment aux enfants – et aux animaux qui fréquentent ce parc », relève la chercheuse spécialiste des maladies animales.
Les scientifiques ont en outre observé une grande diversité génétique chez ces rats. Cela démontre l’existence de connexions spatiales et d’échanges génétiques entre différentes populations de rats au-delà des limites du parc et du périmètre de dispersion fréquemment admis pour ces animaux.
La « leçon de cette étude », c’est que pour lutter efficacement contre la prolifération des rats, « il faut agir sur plusieurs facteurs, en limitant leurs ressources, en utilisant des traitements, mais aussi en agissant sur d’autres façons de limiter les populations, souligne Gwenaël Vourc’h. En zone rurale, les prédateurs jouent un rôle important. Sur le plan du contrôle chimique, il est important d’avoir plusieurs molécules à disposition car si on n’emploie qu’une seule stratégie, à force les rats vont réussir à la contourner », ajoute-t-elle.