Micro-algues, champignons, éponges ou mollusques… des chercheurs montrent que les caniveaux parisiens abritent une grande diversité de micro-organismes.
Organisés en communautés, ces micro-organismes sont susceptibles d’être des acteurs importants du traitement des eaux de pluie et des détritus urbains en contribuant à la décomposition des déchets solides et d’autres types de polluants (gaz d’échappement, huile moteur, etc.). Des connaissances approfondies sur la composition et le rôle de ces communautés biologiques pourraient amener à identifier les éventuels services fournis par ces écosystèmes. Ces résultats, qui montrent pour la première fois la richesse insoupçonnée de la vie microbienne dans nos rues, sont publiés dans the ISME journal.
C’est en constatant une couleur caractéristique de l’eau des caniveaux (marron ou verte) et l’apparition de bulles, témoin d’une activité photosynthétique, que des chercheurs du laboratoire Biologie des organismes et des écosystèmes aquatiques (CNRS) ont soupçonné la présence de micro-algues dans les rues parisiennes. Ils ont analysé divers échantillons d’eau non potable (provenant de la Seine, du canal de l’Ourcq, des bouches de lavage et des caniveaux) afin de déterminer quelles espèces de micro-organismes y étaient présentes.
A partir d’une centaine d’échantillons d’eau et de biofilms (des communautés de micro-organismes) prélevés dans tous les arrondissements de Paris, les chercheurs ont identifié 6900 espèces potentielles d’eucaryotes. Une grande partie de cette biodiversité correspond à des micro-algues du groupe des diatomées. D’autres eucaryotes unicellulaires (alvéolés, amibes, rhizariens), des champignons (dont certains connus pour être des décomposeurs), des éponges et des mollusques ont été identifiés. Plus étonnant, les analyses montrent que près de 70 % de ces espèces sont absentes des sources d’eau non potable. Les types de communautés changent en effet énormément d’un site de prélèvement à l’autre, ce qui suggère une origine probablement liée aux activités humaines et/ou une adaptation urbaine de ces micro-organismes.
Les caniveaux des rues apparaissent ainsi comme un nouveau compartiment biologique aux rôles écologiques à explorer : quels sont exactement ces organismes ? Que font-ils réellement ? Participent-ils à la purification de l’eau, au sein même de la rue, à la manière de micro-stations d’épuration ? Comment se sont-ils adaptés à la ville ? Faut-il les surveiller ? Autant de questions auxquelles souhaitent répondre les chercheurs en étudiant également d’autres domaines de la vie, comme les procaryotes (des organismes sans noyau, comme les bactéries), sur de plus grandes périodes de temps, voire dans d’autres villes.