Il faudrait à l’avenir systématiquement enfermer les canards à certaines périodes de l’année pour éviter qu’ils n’attrapent l’influenza aviaire via les oiseaux migrateurs, mais aussi envisager de réduire les densités d’élevage dans le Sud-Ouest, estime un responsable de l’agence sanitaire Anses dans un entretien avec l’AFP.
Au 20 janvier, la France comptait 348 foyers d’influenza aviaire (communément appelée grippe aviaire), principalement dans des élevages des Landes. L’épizootie a déjà entraîné l’abattage -y compris préventif- de plus d’un million de volailles, essentiellement des canards. Cette infection virale frappe durement la filière du foie gras, qui se remettait à peine de l’épisode 2016-17, marqué par l’abattage de 4,5 millions de palmipèdes. « Ça fait deux crises graves en trois ans. Il faut qu’on s’interroge sur les causes de cette crise, sur ce qui favorise ces épizooties aussi massives dans l’élevage de canards et ce qu’il faut changer pour éviter que ce soit aussi massif la prochaine fois« , indique Gilles Salvat, directeur général délégué à la recherche et directeur de la santé animale et du bien-être animal à l’Anses.
S’il faudra sans doute vivre avec cette maladie qui peut être transmise aux volailles par des oiseaux sauvages infectés lors de leurs migrations annuelles vers le sud, « la question, c’est d’éviter que trois cas ne se transforment en 300« , poursuit M. Salvat. Cette année, « les deux ou trois premières contaminations qu’on a pu voir dans les Landes sont probablement des contaminations par la faune sauvage » de canards d’élevage laissés en liberté malgré le passage du territoire national en risque « élevé » de contamination, qui impose en principe le confinement des volailles. Une dérogation permet aux exploitations de moins de 3.200 palmipèdes de les laisser dehors.
Or, « une fois que le virus est introduit, force est de constater qu’on court après« . « Il ne s’agit pas de dire qu’il faut remettre tous les canards à l’intérieur, tout le temps, mais il faut avoir la capacité de rentrer ses animaux, y compris quand on est un petit élevage en autarcie, pour éviter l’introduction [du virus] par des animaux laissés en liberté qui vont attirer les oiseaux sauvages« , a minima pendant la période de risque maximal « entre le 15 novembre et fin décembre, début janvier« .
Pour le responsable de l’agence sanitaire, claustrer ne suffit pas si le virus dispose d’une forte densité de « supports » pour se multiplier. « Le virus est tombé au mauvais endroit, au mauvais moment. On a des oiseaux contaminés qui se sont posés dans la zone de plus forte densité de canards en France, mais aussi en Europe. » L’interprofession du foie gras Cifog estimait, avant la massification des abattages préventifs, que « plus de 5 millions » de palmipèdes étaient en cours d’élevage dans une large zone de production à cheval sur les Landes, le Gers et les Pyrénées-Atlantiques. En Chalosse, l’épicentre de l’épizootie dans le sud des Landes, « on peut avoir plusieurs dizaines d’élevages sur un rayon d’un kilomètre« , relève M. Salvat.
« La densité d’oiseaux dans cette zone est telle que, de proche en proche, les élevages se sont contaminés à partir des foyers initiaux. On a une contamination un petit peu en tache d’huile, qui n’empêche pas des sauts de contamination [de plus longue distance] qui s’expliquent probablement par des échanges de personnes, de matériels ou d’oiseaux entre les élevages. » Ainsi, après le 15 décembre, synonyme de fin des migrations vers le sud, la découverte de nouveaux foyers n’est plus imputée aux contacts des palmipèdes avec la faune sauvage, mais « plus vraisemblablement aux activités humaines autour de l’élevage« , dans un environnement saturé de virus. « Très concrètement, si on veut diminuer la vitesse de propagation du virus, il faut que le virus trouve moins de supports de multiplication proches du premier élevage qui est touché, donc il faut diminuer les densités.«