En Bretagne, deuxième région agricole de France, on bétonne l’équivalent de neuf terrains de football chaque jour, sous la pression de l’étalement urbain. Un phénomène qu’essaie de contenir l’établissement public foncier (EPF) de Bretagne, créé il y a dix ans.
Plus de 3.100 km2 de terres bretonnes sont d’ores et déjà transformées en zones artificielles (maisons individuelles, zones commerciales, routes, etc.) par opposition aux terres agricoles et espaces naturels. Et cette tendance augmente de 0,76% par an, soit l’équivalent de neuf terrains de football par jour, selon la Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement (Dreal) de Bretagne. Au niveau national, l’artificialisation a progressé de 61.200 hectares par an entre 2006 et 2014, selon un rapport parlementaire, soit l’équivalent de 239 terrains de football par jour. L’essentiel de ce phénomène est dû à l’extension des zones pavillonnaires sur des terres agricoles. Les conséquences sont multiples : recul de la biodiversité, incapacité du sol à stocker du carbone, diminution des terres arables, etc. [ihc-hide-content ihc_mb_type= »show » ihc_mb_who= »1,2,3,4,5″ ihc_mb_template= »1″ ]
C’est ce constat qui a conduit à la création de l’établissement public foncier de Bretagne en 2009. L’EPF aide les maires qui en font la demande à repérer des friches ou des dents creuses dans des zones déjà urbanisées pour éviter l’étalement urbain. L’établissement achète, dépollue, voire déconstruit les bâtiments existants puis revend le terrain à un bailleur social ou à un promoteur, en gardant à sa charge une partie des coûts. « C’est un coup de pouce fait à la collectivité locale car tout est toujours un peu plus compliqué et risqué quand on s’attaque au renouvellement urbain, explique Carole Contamine, directrice générale de l’EPF. Le maire est plutôt incité à faire vite son lotissement qui lui permettra de garder son école », dit-elle. Financé par la taxe spéciale d’équipement, l’EPF dépense environ 40 millions d’euros par an en opérations foncières et garde les terrains achetés entre 5 et 7 ans. En dix ans, ces opérations ont permis la construction de plus de 21.000 logements, qui, s’ils avaient été construits de manière classique, auraient grignoté plus de 1.100 hectares de terres agricoles (soit 1.571 terrains de football). Avec l’objectif de « zéro artificialisation nette de sols agricoles » fixé par l’État, « on sent qu’il se passe quelque chose en ce moment. Les élus sont bien conscients qu’il faut évoluer, souligne Mme Contamine. C’est assez réjouissant de voir des maires revoir leur façon de faire ».
D’après un rapport de la Fédération Nationale des Sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (FNSafer), l’artificialisation des sols mesurée par le nombre de transactions concernant des terres qui perdent leur vocation agricole repart à la hausse ces dernières années, à raison de 50 000 à 60 000 hectares par an. L’augmentation du nombre de transactions, qui était de 3,8 % en 2015, s’élève ainsi à plus de 22 % en 2016. Si ce phénomène d’urbanisation des terres se poursuit à ce rythme, 2,2 à 2,6 millions d’hectares auront été artificialisés à l’horizon 2060, soit 8 à 9 % de la surface agricole utile (SAU). A cette échéance, un cinquième des terres occupées par des activités agricoles aura alors été perdu en un siècle. Cette artificialisation (qui correspond souvent à la bétonisation, ou à la bitumisation des terres) risque d’avoir de lourdes conséquences, puisqu’elle entraîne une imperméabilisation du sol, qui devient inutilisable pour l’agriculture pendant une très longue période. Ces conséquences sont d’autant plus importantes que le changement climatique risque de réduire les rendements.
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