Nous tous qui, depuis un funeste jour d’avril 1988, portons le deuil de Pierre Desproges, pouvons enfin apercevoir une lumière au bout du tunnel. Dans le ciel du « Tribunal des flagrants délires », une nouvelle étoile vient d’apparaître.
Cette star du barreau s’appelle Me Pierre Morier, retenez bien son nom. Il a connu cette semaine son quart d’heure de célébrité warholien en commentant la décision du tribunal correctionnel de Clermont-Ferrand qui vient de condamner ses clients, propriétaires d’un élevage de 9000 porcs à Limoise (Allier), à 25 000 € d’amende ferme (+ 25 000 € avec sursis).
L’affaire est la suivante : en 2020, l’association L 214 avait publié des vidéos tournées clandestinement et prouvant que cet établissement se livrait de manière systématique à la caudectomie, qui consiste comme son nom l’indique à couper la queue des porcs. Or, cette pratique du genre barbare est rigoureusement interdite depuis… 2003 !
« C’est une décision très sévère », a réagi le ténor des prétoires : « mes clients sont condamnés pour une infraction délictuelle ». Un peu comme tous les délinquants, en somme…
« On leur dit que la maltraitance est intentionnelle ». C’est vrai, quoi ! Ces abrutis de magistrats, aveuglés par leur idéologie porcino-gauchiste, n’ont même pas envisagé que les tenanciers de l’usine à cochons aient pu couper une par une les queues de 9 000 porcelets par inadvertance, à l’insu de leur plein gré. Ah, elle est belle, la Justice ! On imagine au passage la plaidoirie : « mon client nettoyait son canif pour préparer son casse-croûte, il a eu un geste maladroit, et voilà… 9 000 tire-bouchons qui prennent leur indépendance ». Pas de quoi condamner d’honnêtes artisans, hein ?
Le plaideur dispose d’autres arguments tout aussi décisifs : « On criminalise une pratique qui concerne 99% des éleveurs européens ». Là encore, les droits de l’homme sont gravement menacés. Un peu comme si, en condamnant pour meurtre, on se permettait de criminaliser une pratique qui concerne, les statistiques sont formelles, au moins 99 % des assassins !
Au passage, on ne « criminalise » rien du tout en jugeant des délinquants en correctionnelle : les crimes sont jugés aux Assises. Mais que Me Morier se rassure : le ridicule ne relevant pas du code pénal il n’est personnellement menacé d’aucune de ces juridictions.
Revenons pour finir à Desproges, le vrai : « l’intelligence c’est le seul outil qui permet à l’homme de mesurer l’étendue de son malheur ». Bienheureux Me Morier…