Des colonies artificielles pour sauver les manchots du Cap

Photo d'illustration ©Michael_Luenen de Pixabay

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Face à une diminution massive du nombre de manchots du Cap, Birdlife Afrique du Sud met en place des colonies artificielles, espérant ainsi freiner le déclin de leurs populations.

Les eaux au large de la côte sud-africaine abritent une biodiversité incroyable allant des baleines, dauphins et requins aux oiseaux marins tels que l’albatros et le pétrel. Seulement, les activités humaines impactent cette zone de plein fouet avec des conséquences de plus en plus importantes. Le manchot du cap (Spehniscus Demersus), espèce emblématique d’Afrique du Sud, mais également présent à l’extrémité sud-ouest du continent et en Namibie, est particulièrement menacé par la pêche excessive, les marées noires, le développement urbain et le changement climatique. Cette espèce a été classée « en danger » sur la liste rouge de l’UICN (Union Internationale pour la Conservation de la Nature) car elle connaît un déclin rapide. Autrefois, alors que les populations de manchots du cap étaient encore en bonne santé, 1,5 à 3 millions d’individus étaient recensés. La population est tombée à 300 000 en 1956 et ne cesse de diminuer depuis. En 2020, moins de 13 000 couples avaient pu être observés en Afrique du Sud.

Afin de reconstruire les populations de manchot du cap en Afrique du Sud, le bureau local de l’association de lutte pour la conservation des oiseaux Birdlife étudie les possibilités de créer de nouvelles colonies d’oiseaux sur une partie de la côte qui ne comporte pas d’îles au large, mais où les poissons sont très abondants. Ces deux paramètres sont importants, car les manchots africains se reproduisent normalement sur des îles où ils sont à l’abri des prédateurs. Le problème est que la disponibilité des ressources alimentaires pour le manchot comme l’anchois et la sardine connaissent également un déclin massif de leurs populations. De plus, en raison de l’évolution de la répartition de leurs proies, il existe désormais un décalage entre les îles de reproduction des manchots et les stocks de poissons, car les manchots reproducteurs ne peuvent pas chasser à plus de 40 km, au maximum, du nid de reproduction s’ils veulent nourrir régulièrement leurs petits.

« L’objectif est de créer une résilience dans la population de manchots en augmentant le nombre de colonies et de combler le fossé entre les populations de l’ouest et de l’est et de permettre aux manchots de se reproduire dans une région qui dispose de proies saines » explique Birdlife Afrique du Sud. Du fait de l’absence d’îles de reproduction au large, les premières tentatives ont malheureusement échoué à cause de la prédation, ce qui a entraîné l’abandon des colonies. Pour éviter que cela ne se reproduise, l’ONG a installé une clôture anti-prédateurs – conçue en collaboration avec un expert en clôtures pour animaux sauvages – le long du périmètre du site. Le site a également été équipé d’un système de surveillance à distance avec des caméras qui envoient des alertes au personnel du projet lorsqu’un mouvement de prédateur est détecté.

Les manchots se reproduisent en colonies et sont donc moins susceptibles de migrer vers un nouveau site où aucun d’entre eux ne se reproduit déjà. Birdlife a ainsi mis en place des leurres pour attirer les manchots vers ce nouveau site afin qu’ils s’y reproduisent. Une fois que la reproduction est en marche dans une zone donnée, les manchots y retournent chaque année. Très fidèles à leur partenaire au fil du temps, cette habitude leur permet de le retrouver chaque année sur le site. Grâce à cette méthodologie, Birdlife espère que les manchots viendront peu à peu constituer une colonie pérenne dans ce lieu, ce qui contribuera – peut-être – à l’augmentation de leurs effectifs.