Près d’un mois sur un platane perché : par son coup d’éclat en août devant le ministère de la Transition écologique, le tarnais Thomas Brail est devenu le déclencheur d’une mobilisation générale au secours des arbres menacés d’abattage.
Un militant écologiste est resté perché presque un mois dans un platane pour protester contre l’abattage des arbres. « J’ai failli ‘mourir’… 28 jours encordé dans un arbre en plein Paris« , lance Thomas Brail, un quadragénaire énergique au visage fin mangé d’une barbe noire, qui « déteste » la vie urbaine. Dans son sanctuaire, une bergerie retapée au pied de la Montagne noire, il se remémore ces derniers mois qui l’ont arraché à une vie tranquille « à la campagne« . Après une première rencontre mi-janvier avec la ministre Élisabeth Borne, il se prépare à un nouveau rendez-vous le 11 février au ministère, avec plusieurs associations, pour faire « avancer la cause des arbres« . « Vous menez un combat sincère et juste« , l’avait salué la ministre dans un tweet mi-janvier. « Moi à la base, mon boulot c’est de sauver des arbres« , explique ce « grimpeur arboriste » longiligne qui travaille dans une coopérative. « Attention, je ne suis pas un extrémiste, je me chauffe au bois« , s’amuse-t-il devant sa cheminée. [ihc-hide-content ihc_mb_type= »show » ihc_mb_who= »1,2,3,4,5″ ihc_mb_template= »1″ ]
Il entre en résistance en mai dernier, sans vraiment réfléchir, quand il découvre que la ville de Mazamet, où il a « travaillé comme jardinier pendant 10 ans » entend couper un alignement de platanes « de 200 ans » pour aménager un parking. Il passe trois jours au sommet de l’un de ces arbres, rejoint par un « éducateur en grimpe d’arbre » qui lui propose de relayer leur action sur Facebook. Après Mazamet, ce sera Condom, dans le Gers, au secours de 16 autres platanes. « Les élus n’ont aucune conscience des enjeux climatiques lorsqu’ils engagent des travaux. Notre rôle c’est de les éduquer« , affirme le grimpeur. Les maires de Mazamet et Condom n’ont pas répondu aux sollicitations de l’AFP. Thomas Brail cite encore comme « mauvais élève » La-Grande-Motte, où il s’est rendu récemment. La commune héraultaise vient de décider de couper plus de 8.000 arbres. Début août, voyant que le maire de Condom refuse toute discussion, Thomas décide de porter son combat à Paris.
L’expérience l’a profondément marqué : « la descente a été super compliquée, physiquement d’abord, car je n’avais pas posé le pied par terre pendant quatre semaines« . « On n’en ressort pas indemne sur le plan personnel, professionnel et familial. J’ai loupé les deux ans de mon petit garçon« , ajoute-t-il. Au début pourtant, cela a été presque un jeu : il se souvient de « l’affolement » du gendarme en faction devant le ministère, le découvrant perché. A une relative indifférence succède l’engouement médiatique, « les journalistes de retour de vacances ont débarqué !« . Plusieurs personnalités – Juliette Binoche, Bruno Solo, des naturalistes, des écologistes… – se rallient à son combat. Alain Baraton, le jardinier en chef de Versailles, salue « un geste qui ne manque pas de panache« : « il est important qu’il y ait des sentinelles, des lanceurs d’alerte« . « Les élus aiment les arbres autant que nous, mais devant certains projets on évoque une maladie, le dépérissement ou la dangerosité des arbres souvent de façon excessive« , estime cet expert du végétal.
Pour Georges Feterman, le président de l’association Arbres remarquables, « Thomas Brail a réussi à faire que nous soyons reçus par la ministre alors que depuis plusieurs dizaines d’années nous y avions échoué« . En quelques semaines, une quarantaine d’antennes locales de la petite association de Thomas Brail – le Groupe national de surveillance des arbres – voient aussi le jour. « Je n’ai pas eu d’ennui car je m’appuie sur la loi« , martèle Thomas en brandissant l’article L350-3 du code de l’environnement. Ce texte dispose que l’on ne peut abattre d’arbres d’alignement que lorsqu’ils présentent « un danger pour la sécurité ou sanitaire« . Fin août, les 16 platanes de Condom sont finalement abattus. « On a perdu des arbres mais si c’est pour en gagner d’autres !« , s’exclame Thomas Brail qui veut porter dorénavant son combat au niveau européen, « pour créer un véritable statut de l’arbre« .
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