Une nouvelle étude quantifie les impacts des espèces exotiques envahissantes en fonction de leur position dans la chaîne trophique, et rappelle l’importance d’une détection rapide, voire anticipée, des processus d’invasion biologique.
Les espèces exotiques envahissantes (EEE) sont la quatrième cause de perte de biodiversité dans le monde. Si la science a prouvé que, à l’échelle globale, les EEE impactaient négativement les écosystèmes, la dynamique de cet impact n’a jamais été quantifiée, notamment pour savoir si ce dernier est constamment le même quel que soit le niveau d’abondance des EEE (dynamique linéaire), ou si son intensité varie suivant leur niveau d’abondance (dynamique non linéaire). Une équipe de recherche internationale menée par l’Université du Massachusetts à Amherst, comprenant un chercheur du Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS) a analysé 1258 cas d’étude issus de 201 publications scientifiques et démontré que le caractère linéaire ou non de cette relation entre abondance d’une espèce exotique envahissante et son impact sur les communautés d’espèces natives dépend de la position trophique relative entre l’envahisseur et les résidants. « Lorsque l’espèce exotique envahissante provient des niveaux trophiques supérieurs, comme dans une relation verticale de type proies-prédateur avec dans le rôle du prédateur l’espèce exotique envahissante, c’est au départ de l’invasion, lorsque l’abondance de l’espèce exotique est relativement faible, qu’une faible augmentation de son abondance aura l’impact le plus fort et le plus négatif sur le réseaux d’espèces natives jouant le rôle de proies« , résume le CNRS dans un communiqué. Ainsi une faible quantité d’individus peut avoir un effet dévastateur sur la ressource consommée, mais lorsque le nombre d’individus a atteint un niveau supérieur, l’impact sur les communautés d’espèces natives est relativement faible du fait que la ressource consommée s’est raréfiée. Par contre, « lorsque la relation trophique entre espèces exotiques envahissantes et espèces natives est horizontale, comme dans une relation de compétition par exemple, l’augmentation de l’abondance de l’espèce exotique envahissante aura le même impact sur la communauté d’espèces natives et ce que le niveau de l’invasion soit précoce ou avancé. » Cette étude pointe donc que, dans le cas des relations trophiques verticales, seule la détection précoce, voire anticipée, de l’espèce exotique envahissante, permettra d’endiguer le processus d’invasion et éviter les effets néfastes de celle-ci, tandis que dans une relation de type horizontale, les moyens mis en œuvre pour limiter ou endiguer l’invasion pourront s’avérer payant, même après installation et expansion de l’espèce exotique envahissante. « Quoi qu’il en soit, une stratégie basée sur la détection anticipée ou précoce sera toujours la stratégie la plus efficace, conclut le communiqué. Dans ce cadre, les techniques de télédétection par satellites ou aéroportée procurent un système de surveillance et d’alerte adéquat et opérationnel pour anticiper ou détecter de manière précoce les foyers d’invasions. »