Stressé par le blanchiment de son anémone, le poisson-clown pond moins

1889
⏱ Lecture 2 mn.

Le blanchiment des anémones impacte les hormones reproductives du poisson, conduisant à une baisse de la fécondité de 73%.

Quand l’anémone qui le protège blanchit sous l’effet du réchauffement de la mer, le poisson-clown stresse et a moins de petits, selon une étude qui s’inquiète de l’impact du changement climatique sur la reproduction d’autres espèces des récifs coralliens. « Cette étude de 14 mois montre une forte corrélation entre le blanchiment de l’anémone, la réponse au stress du poisson-clown et les hormones reproductives qui ont conduit à une baisse de la fécondité de 73% », résume l’étude publiée dans la revue Nature Communications. Le poisson-clown vit en symbiose avec son anémone : il se cache dans ses tentacules pour se protéger de ses prédateurs et pond au moins une fois par mois à son pied. D’octobre 2015 à décembre 2016, des chercheurs ont étudié en mer des couples de poissons-clowns dans les récifs coralliens de l’île de Moorea, en Polynésie française. Pendant cette période, sous l’effet d’El Nino, cette région du Pacifique a connu sur plusieurs mois une augmentation de la température de la mer, causant le blanchiment temporaire d’une partie des anémones, un phénomène similaire à celui plus connu qui affecte les coraux. En comparant notamment 13 couples vivant sur une anémone ayant blanchi pendant plusieurs mois et d’autres vivant sur une anémone n’ayant pas été touchée, les chercheurs ont mis en lumière l’impact « en cascade » du réchauffement. « Des prélèvements de sang sur les couples de poissons-clowns ont permis de constater une forte hausse des taux de cortisol, l’hormone du stress, et une baisse importante des concentrations en hormones sexuelles », provoquant ainsi une diminution de la fécondité, a expliqué dans un communiqué le CNRS, associé à l’étude. « Ces liens, déjà établis dans des expériences de laboratoire, sont confirmés pour la première fois dans des conditions naturelles chez des poissons », a-t-il ajouté.

Et avec le réchauffement climatique qui contribue au blanchiment des coraux et des anémones dans le monde entier, « Nemo » risque de ne pas être la seule victime. « Nous estimons que d’autres espèces associées aux anémones de mer et aux coraux pourraient répondre de façon similaire aux épisodes de blanchiment, ce qui se traduirait par des pertes importantes d’efficacité de la reproduction », selon l’étude. « 12% des espèces de poissons côtiers en Polynésie française dépendent des anémones ou des coraux pour se nourrir ou se protéger des prédateurs, précise le CNRS. En cas de blanchiment prolongé, comme celui de la Grande barrière de corail australienne en 2016 et 2017, c’est le renouvellement de toutes ces populations qui pourrait être affecté, et avec lui la stabilité des écosystèmes », s’inquiète-t-il.