Afin de développer les obligations réelles environnementales (ORE) en France, la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) a publié une note explicative du fonctionnement de cet outil de protection et de gestion de la biodiversité.
Les obligations réelles environnementales (ORE) sont un instrument de protection et de gestion de la biodiversité. Elles ont été créées par l’Article 72 de la loi n°2016 – 1087 du 8 août 2016 sur la reconquête de la biodiversité. Les ORE sont un mécanisme contractuel, adapté de servitudes de conservation en vigueur dans les pays anglo-saxons. Une servitude de conservation ou « conservation easement » est un accord volontaire conclu entre un propriétaire foncier et un organisme de conservation (public ou privé), définissant les usages permis ou non sur un terrain et ayant pour objectif la protection et la subsistance des valeurs environnementales de ce terrain. Inspirées de ce mécanisme, les obligations réelles environnementales permettent aux propriétaires d’un espace naturel de conclure un contrat avec une personne morale de droit public ou de droit privé agissant pour la protection de l’environnement, faisant naitre à sa propre charge « des obligations qui ont pour finalité le maintien, la conservation, la gestion ou la restauration d’éléments de la biodiversité ou de fonctions écologiques ». « Il conserve la propriété de son bien, mais en restreint volontairement l’usage. Ces obligations sont dites réelles, car elles sont liées au terrain, et non pas personnelles, comme liées au souscripteur », indique la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) dans une note dédiée au développement de cet instrument en France.
Dans sa note explicative du fonctionnement des ORE, la FRB souligne que le gouvernement n’a pas appliqué l’article 72 de la loi biodiversité depuis plusieurs années. L’article prévoit que « dans un délai de deux ans (soit avant le 8 aout 2018) le gouvernement dépose, sur les bureaux de l’Assemblée nationale et du Sénat un rapport sur les moyens de renforcer l’attractivité, notamment au moyen de dispositifs fiscaux incitatifs, du mécanisme d’ORE ». En effet, en contractant une obligation réelle au profit de l’intérêt général, le propriétaire consent une double perte : il diminue, à la fois, la valeur de son terrain et les revenus qu’il peut en tirer. A l’étranger, le succès des servitudes de conservation est ainsi en grande partie dû au régime fiscal qui les accompagne, « qui compense une partie de cette perte et qui permet d’inciter les propriétaires à souscrire ces servitudes de conservation » Or, près de trois ans après la date butoir et près de cinq ans après la création des ORE, le rapport prévu par l’article 72 n’a pas été déposé, et le mécanisme prévu par la loi Biodiversité ne suffit pas : les communes peuvent bien exonérer de taxe sur le foncier non bâti (TFNB) les terrains sur lesquels a été conclue une ORE, mais elles subiront alors une perte de rentrées fiscales non compensées par l’Etat, et sont donc peu disposées à le faire. L’article 73 de la loi sur la biodiversité n’est donc pas appliqué, alors que « plusieurs projets d’ORE attendent l’entrée en vigueur du régime fiscal incitatif annoncé pour se concrétiser. » Plusieurs amendements ont été déposés sur ce sujet dans le cadre de l’examen du Plan Climat et résilience qui a débuté le 8 mars 2021. La note de la FRB a ainsi pour but de relancer ce sujet jusqu’alors bloqué.
Dans l’attente d’un régime fiscal incitatif aux ORE, la fondation a présenté les principaux mécanismes fiscaux mis en œuvre à l’étranger et dégage les traits majeurs des dispositions fiscales réellement incitatives à la conclusion de servitudes de conservation. Aux États-Unis par exemple, lorsqu’une entreprise fait don d’un terrain à des fins de conservation (on parle de don de servitude de conservation, car le propriétaire fait don de certains droits d’usage de son terrain à un organisme de conservation), elle bénéficie d’une déduction fiscale qui permet aux propriétaires et aux entreprises de déduire du revenu imposable (impôt sur le revenu) tout ou une partie de la valeur d’une servitude de conservation. Cette déduction s’effectue sur l’impôt sur le revenu des sociétés à hauteur de la valeur du don du résultat imposable (maximum 10% du résultat imposable) pour les 5 années suivant le don. Pour les sociétés agricoles la déduction est utilisable sur les 15 années suivant le don.