🔻Congo : comment la pêche industrielle ruine les petits pêcheurs et détruit des espèces protégées

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Un rapport de l’ONG Traffic, accompagné d’un reportage vidéo, montre comment la pression exercée par la pêche industrielle appauvrit les pêcheurs traditionnels et les contraint à vendre des ailerons de requins pour le marché asiatique.

La République du Congo (RDC), est le quatrième plus grand pays de pêche de requins-marteaux halicornes entre 2000 et 2017. Au moins 15 espèces de requins et raies inscrits à la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES) y sont régulièrement pêchés.

Pour l’étude réalisée par Traffic, trente pêcheurs et transformateurs de poissons consentants, sélectionnés de façon aléatoire, ont été interrogés en mars et en avril 2019 à Songolo, site principal de débarquement, du marché et du village de la pêche artisanale à Pointe-Noire. Des informations supplémentaires ont été recueillies à Brazzaville et à Pointe-Noire entre mars et novembre 2019.

La FAO, la CITES, et d’autres organisations internationales ont pris des décisions en matière de conservation et de gestion des requins, mais la loi nationale n’a pas encore transposé cet arsenal ni édicté les dispositions juridiques appropriées. Les requins ne sont mentionnés que dans la loi nationale régissant la pêche maritime aux fins de productivité économique, d’approvisionnement en poisson pour l’alimentation, et de collecte des recettes de l’État par le biais d’un système de quotas basé sur la demande. Le Plan d’Action National pour la conservation et la gestion des requins (PAN-requins) envisagé au début des années 2000 n’a jamais été élaboré.

Les statistiques officielles sur les catégories de pêche et les types de pêche conformes au système de quotas ne contiennent pas de données sur la pêche illégale, ni sur les stocks de poissons, ce qui ne permet pas de surveiller la surpêche et la pêche illicite.

La pêche artisanale ciblée sur requins par les pêcheurs migrants à l’aide des bateaux « Popo » (grands bateaux motorisés), représente une proportion importante des prises à Pointe-Noire depuis le début des années 1980, stimulée par la demande croissante de l’Asie de l’Est et du Sud-Est pour les ailerons. Elle est également motivée par la demande locale de viande de requins transformée, ce qui complique  toute incitation à la pratique inhumaine et destructrice de l’enlèvement des ailerons de requins à bord. Sur les 1 868 701 kg de prises de requins recensées en 2017, 95% (1 766 589 kg) provenaient de la pêche artisanale, soit 32% du total des prises artisanales de poissons. La viande est transformée et vendue sur le marché local et intérieur, tandis que les ailerons sont transformés et très probablement envoyés à la région administrative spéciale de Hong Kong, qui a enregistré des importations totales de 131 594 kg d’ailerons de requins du Congo entre 2005 et 2019. Bien que la pêche artisanale des requins cible les adultes en raison de la valeur plus élevée de leurs ailerons et de leur viande pour la transformation, des quantités considérables de requins-marteaux et de raies juvéniles sont débarquées.

La flotte active constituée de plus de 110 navires industriels et de moins de 700 bateaux artisanaux (240 bateaux motorisés « Popo » et 450 bateaux motorisés / non motorisés « Vili ») dépasse largement la capacité de charge de la Zone Exclusive Economique (ZEE) du Congo estimée à 30 navires industriels (Maloueki 2005). En fait, de plus en plus de pêcheurs artisanaux congolais prétendent vouloir se tourner vers la pêche au requin en raison de la raréfaction d’autres stocks surexploités par les pêcheries industrielles. Outre la surexploitation, les pêcheurs artisanaux considèrent les chalutiers industriels chinois comme étant leur plus grande menace. Ceux-ci opèrent illégalement dans les zones de pêche artisanale et ce faisant, détruisent leurs engins.

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