Mieux lutter contre la surpêche sur les côtes européennes, introduire des quotas en Méditerranée, créer un label européen de pêche durable… Un rapport parlementaire propose une trentaine de mesures pour lutter contre l’effondrement des stocks de poissons, une menace pour la biodiversité et la pêche elle-même. Dans le même temps, une interdiction de la pêche au cabillaud en mer Baltique est entrée en vigueur.
La flotte européenne, composée de près de 90.000 navires, pêche environ six millions de tonnes de poissons chaque année, ont rappelé les députés Jean-Pierre Pont (LaREM) et Didier Quentin (LR) en préambule de leur rapport sur « une pêche durable pour l’Union européenne« , présenté mercredi 17 juillet. La politique commune de la pêche vise à assurer durablement l’avenir de la pêche, les emplois, tout en préservant la ressource halieutique. Dans les faits, les différentes législations n’ont pas permis de stopper la surpêche: « les stocks (de poissons) d’Atlantique nord-est restent surexploités à près de 60%, même si la situation s’est largement améliorée« , relève le rapport. La situation est encore plus dramatique en Méditerranée « avec 90% des stocks surexploités« . Pour mettre fin à cette situation, les députés font 27 propositions. Ils existent des quotas de pêche (« totaux admissibles de capture », TAC) en Atlantique et en mer du Nord pour chaque type de poissons, basés sur l’avis de scientifiques, ensuite répartis par pays membre et destinés à préserver la ressource en poissons. [ihc-hide-content ihc_mb_type= »show » ihc_mb_who= »1,2,3,4,5″ ihc_mb_template= »1″ ]
Les auteurs du rapport proposent de les programmer sur plusieurs années et surtout d’obliger la Commission et le Conseil européens à justifier chaque cas où ces TAC ne respectent pas les avis scientifiques. En 2018, « 41% des TAC adoptés par le Conseil en 2018 étaient supérieurs aux avis scientifiques« , relève le rapport. Il « demande également une plus grande transparence dans la définition des TAC et des quotas« . Dans le cas de la Méditerranée, les députés préconisent « un plan européen d’urgence » afin d’augmenter la recherche sur les réserves halieutiques, d' »introduire des quotas sur toutes les espèces soumises à une pression de pêche et de mettre en place une gestion véritablement régionale« . Le rapport demande aussi un moratoire de deux ans sur l’obligation de débarquement, c’est-à-dire l’interdiction de rejeter en mer des prises non désirées, la jugeant « largement rejetée par les pêcheurs et encore inappliquée« , la création d’un « écolabel public européen de ‘pêche durable’ » face au foisonnement de labels privés qui « crée une confusion » et « la prise en compte de la pêche de loisir« , concurrente par endroit de la pêche professionnel.
La Commission européenne a par ailleurs donné son feu vert mardi 23 juillet à l’interdiction jusqu’à la fin de l’année de la pêche au cabillaud dans la majeure partie de la mer Baltique, face au risque d’effondrement des stocks. Elle entre en vigueur « immédiatement« , et est valable jusqu’au 31 décembre, indique dans un communiqué l’exécutif européen, qui chapeaute la gestion des stocks de poissons dans les eaux européennes. Alertée par les scientifiques qui suivent l’évolution des ressources halieutiques, la Commission met en garde contre « un déclin rapide du stock qui risque de conduire à un effondrement si aucune mesure n’est prise« . Le total admissible de capture pour le cabillaud de la Baltique orientale, ou quota de pêche, a été réduit chaque année depuis 2014 pour atteindre un peu plus de 24.000 tonnes en 2019. Mais, note la Commission, « les pêcheurs n’ont utilisé ces dernières années qu’entre 40 et 60% » de ces quotas, « probablement en raison de la quantité insuffisante de poissons à taille commerciale« . « Nous devons agir de toute urgence pour reconstituer le stock, tant dans l’intérêt des ressources halieutiques que des pêcheurs« , insiste le commissaire européen à la Pêche Karmenu Vella, cité dans le communiqué.
La situation alarme plusieurs pays, qui avaient pris des décisions de sauvegarde, mais « les Etats membres n’ayant pas tous l’intention d’adopter des mesures nationales, la Commission a décidé de garantir l’adoption de nouvelles mesures d’urgence« . Europêche, qui représente les intérêts de l’industrie de la pêche dans l’UE, a sévèrement critiqué cette décision, estimant qu’il aurait mieux fallu opter pour une réduction « importante » des quotas dans la deuxième partie de l’année, « ce qui aurait pris en compte à la fois la survie de l’espèce et de la flotte« . Une nouvelle évaluation sera faite à l’automne, au moment où les quotas de pêche seront, comme chaque année, décidés lors d’une négociation entre les Etats membres. La Commission note par ailleurs que la pêche n’est pas le seul facteur qui menace le stock, et évoque « le manque de salinité, des températures de l’eau trop élevées et le manque d’oxygène, ainsi que des infestations parasitaires« . Selon les chiffres de la Commission, « plus de 7.000 bateaux de pêche de 8 Etats membres capturent le cabillaud de la Baltique orientale, dont 182 navires de Lituanie et de Pologne qui dépendent de ce stock pour plus de 50% de leurs captures« .
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