Les mesures « d’effarouchement » des ours brun des Pyrénées, destinées à protéger les troupeaux de leur prédation, sont désormais possibles, leur cadre ayant été défini par un arrêté publié au Journal Officiel.
Annoncées au mois d’avril par le ministère de l’Agriculture, les mesures d’effarouchement des ours bruns des Pyrénées, dont la population actuelle est estimée à au moins une quarantaine d’individus, pourront désormais être mises en oeuvre par tout éleveur, groupement pastoral ou gestionnaire d’estive (période ou zone de pâturages, ndlr) ayant obtenu au préalable une autorisation préfectorale. Les méthodes d’effarouchement permises sont graduelles. La première, dite « simple », emploie des moyens d’effarouchement sonores (cloches, sifflets, corne de brume, pétards, etc), olfactifs et lumineux (torches, phares, signaux lumineux de toute nature). Elle doit être justifiée par la survenance d’au moins une attaque sur l’estive au cours de l’année précédant la demande ou d’au moins quatre attaques cumulées sur l’estive au cours des deux années précédant la demande, est-il détaillé dans l’arrêté. [ihc-hide-content ihc_mb_type= »show » ihc_mb_who= »1,2,3,4,5″ ihc_mb_template= »1″ ]
La seconde méthode « renforcée » permet le recours à des tirs non mortels de « toute arme à feu chargée de cartouches en caoutchouc » ou à double détonation. Elle peut être demandée soit dès la deuxième attaque intervenue en moins d’un mois malgré la mise en œuvre de moyens d’effarouchement simple pendant cette période; soit -dans le cas d’estive ayant subi au moins quatre attaques cumulées sur les deux années précédentes- dès la première attaque attribuable à un ours survenue malgré le déploiement de stratégies d’effarouchements simples lors de la période de pâturage en cours. Cette méthode ne peut être réalisée que par un berger ou un éleveur titulaire du permis de chasse, des chasseurs, des agents de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage formés au préalable ou des lieutenants de louveterie. Quelle que soit la méthode d’effarouchement pratiquée, elle fera l’objet d’un compte-rendu détaillé au préfet. Si celle-ci devait être réalisée dans le parc national des Pyrénées, elle serait soumise à l’autorisation du directeur du parc. Appliquées à titre expérimental, ces mesures seront évaluées par l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS).
La publication de cet arrêté survient deux jours après la mort de plus de 250 brebis dans un massif de l’Ariège, tombées d’une crête en raison de la présence d’un ours. L’accident a ravivé les tensions entre les partisans d’un retrait graduel d’ours dans la zone et ceux plaidant pour un renforcement de la protection des troupeaux. Des élus et éleveurs de l’Ariège ont réclamé que l’Etat retire des ours dans la zone. L’expertise réalisée sur place permet « d’imputer à l’ours » ce dérochement, survenu depuis l’estive de Sénard, a confirmé la préfecture de l’Ariège dans un communiqué. Sans attendre cette annonce, Philippe Lacube, président de la Chambre d’agriculture, avait imputé la perte des bêtes à « une attaque d’ours« , lors d’une conférence de presse rassemblant à ses côtés des élus du conseil départemental et des représentants des chasseurs, de la fédération pastorale et des collectivités de montagne.
La préfète, Chantal Mauchet, qui s’est rendue sur l’estive, a indiqué avoir contacté « les ministères concernés et le préfet de région » pour « déployer des moyens supplémentaires d’urgence » face aux prédations. « L’Ariège, cet été, dégueule d’ours (…) on sent l’imminence d’un drame, qui pourrait concerner un randonneur croisant une ourse avec ses petits, ou un éleveur au bout du rouleau« , a pour sa part martelé M. Lacube. Le front d’institutions mobilisées ne voit qu’une solution pour l’heure: « le retrait graduel d’ours, pour soulager la pression« , a-t-il affirmé. « Mais il faut faire vite sinon cela va mal finir« . Alain Duran, sénateur socialiste de l’Ariège, a pour sa part annoncé le dépôt imminent d’une question écrite adressée aux ministres de la Transition écologique et de l’Agriculture, pour demander ce prélèvement d’ours. Dans une motion unanime, les 26 conseillers départementaux ariégeois ont demandé lundi à l’Etat des « mesures efficaces et crédibles » pour assurer la sécurité humaine face aux ours.
La préfecture a précisé qu’une « procédure d’indemnisation rapide sera mise en place pour les deux éleveurs concernés » par le dérochement. Parmi eux, Jean-Pierre Mirouze avait déjà été victime d’une telle perte de bêtes il y a 14 ans. Les associations de protection des ours Ferus et Pays de l’Ours ont quant à eux appelé l’Etat à mieux contrôler la mise en place des mesures de protection des troupeaux contre les ours, après la mort des brebis. « Un ours est présent dans ces vallées, mais est-ce que ça fait de lui le responsable automatique?« , s’interrogent les deux associations, qui demandent aussi un renfort de la prévention des troupeaux. « Pourquoi l’Etat ne fait quasiment aucun contrôle de la mise en oeuvre des mesures de protection des troupeaux qu’il finance, y compris quand les éleveurs déclarent des dégâts?« , s’interrogent-elles.
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