Une étude de l’ONCFS et du MNHN met en garde contre des abattages trop élevés des loups en France

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Des experts préviennent que le taux de prélèvement actuel des loups compromet leur survie et encouragent la mise en place de méthodes alternatives.

Le loup fait partie des espèces protégées en France comme en Europe. Revenu au début des années 1990 en France par l’Italie et concentré dans le Sud-Est, le canidé a vu sa population tripler en dix ans en France, de 100 à 300 individus environ, selon les estimations de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS). Depuis des décennies, les pouvoirs publics ont autorisé l’abattage sous contrôle de loups, espérant ainsi améliorer leur cohabitation parfois difficile avec l’homme et mieux les préserver.

Mais l’augmentation en France de ces abattages menace à long terme la survie de cette espèce protégée, avertit une étude conduite par sept experts de l’ONCFS et du Muséum National d’Histoire Naturelle (MNHN) de Paris. La population des loups en France n’est « pas exposée à un risque d’extinction démographique immédiat », selon l’étude commandée à l’été 2016 par le ministère de l’Environnement, et rendue publique samedi. La survie de l’espèce est menacée quand le taux de mortalité, toutes causes confondues, est autour de 34%. Or, il s’est élevé en moyenne en France à 22% entre 1995 et 2013. Mais depuis, il a été décidé d’augmenter significativement l’abattage sous contrôle des loups, ce qui ferait basculer dans une situation plus critique, pointe l’étude en se fondant sur la période 2013-2016.

Depuis leur retour en France, les effectifs de loups ont augmenté, d’abord rapidement, puis de façon plus hésitante ces dernières années. « La ‘‘cassure’’ observée dans la courbe d’évolution des effectifs correspond dans sa temporalité au changement de politique de gestion de l’espèce », souligne l’étude. Ainsi, depuis trois ans, le nombre de prélèvements dérogatoires annuels est passé de quelques individus à 36 pour les années 2015 et 2016, soit plus de 10% de l’effectif total d’environ 300 individus. Selon les experts, les prélèvements légaux ne devraient pas « dépasser 10 % de l’effectif estimé pour que la population présente un bilan numérique au moins stable ». Or, ils poursuivent en indiquant que si la politique de gestion « devait entrainer une stabilité des effectifs elle induirait l’impossibilité d’atteindre les objectifs de viabilité génétique à long terme au sein du seul territoire français, » mettant donc en danger la population française de loups.

Au vu de ce constat, l’étude recommande la mise en place d’une « gestion adaptative » des loups. Cette dernière se caractérise par « un processus dynamique qui intègre apprentissage, par une compréhension croissante du système au cours du temps et ajustement des orientations choisies au cours du temps, » afin d’atteindre l’objectif de conservation du loup tout en minimisant son impact sur l’élevage. Concrètement, les experts indiquent que les prélèvements de loups ne suffiront pas à enrayer les attaques sur le long terme, et que la mise en place d’actions alternatives, comme l’usage de chiens de troupeaux, s’impose. « Les méthodes non létales pour réduire les dégâts sur les troupeaux seraient plus efficaces et plus justifiables que les tirs de prédateurs, conclut l’étude. Nous ne pouvons qu’encourager les approches complémentaires. »

Le rapport