Bon sang, l’année commence vraiment mal !
Ce samedi, nous avons perdu une indispensable, une irremplaçable boussole. Certes, une boussole d’un type particulier, c’est ce qui faisait tout son charme : obstinément, vaillamment, elle a toujours indiqué le sud. Peut-on imaginer plus magnifique collection de fake-news, d’entourloupes, d’erreurs plus ou moins volontaires, de mauvaise foi assumée, de mensonges hautains, que la carrière de Claude Allègre ?
Il n’a pas 40 ans quand débute la série de ses fiascos retentissants. A la Guadeloupe, le volcan de la Soufrière vient de donner des signes de réveil. Alors directeur de l’Institut de physique du globe de Paris (IPGP), Allègre -qui n’est pas vulcanologue- sonne le tocsin, annonce l’apocalypse, prescrit l’évacuation forcée de 70 000 personnes, et s’oppose violemment au grand vulcanologue Haroun Tazieff, qui démontre que les phénomènes constatés sont de type phréatique et non d’origine magmatique, et ne présentent aucun danger pour la population.
Aucune éruption ne se produira, et le consensus scientifique donnera raison à Haroun Tazieff… qu’Allègre fera pourtant virer de l’IPGP.
Vingt ans ont passé quand, en 1996, Claude Allègre -qui n’est pas pneumologue- prend publiquement position contre le désamiantage de l’université de Jussieu, estimant que l’opération très coûteuse n’est pas justifiée au regard du risque. Dix ans plus tard, une étude révèlera la mort de cinq chercheurs de Jussieu d’un cancer de la plèvre causé par l’exposition à la fibre cancérigène, un bilan qui ne fera que s’alourdir.
Mais le meilleur reste à venir. Au tournant des années 2000, Allègre -qui n’est pas climatologue- entreprend une carrière de climato-négationniste compulsif, sur le mode « il n’y a pas de réchauffement, et d’ailleurs le réchauffement n’est pas d’origine humaine… ». Au soutien de sa croisade, il n’hésitera pas à fausser des résultats scientifiques, sera convaincu de fraude, et verra ses assertions réfutées à l’unanimité par l’Académie des sciences.
Allègre était pourtant un géophysicien reconnu. Mais il appartenait à cette catégorie de scientifiques profondément convaincus que la science doit servir à dominer la nature, pas à la comprendre. Espérons -sans trop y croire toutefois- que l’espèce s’est éteinte avec lui…