Ah, la magie de Noël… Toutes les générations réunies… Le sapin qui scintille de mille feux… Les cadeaux, délicatement empaquetés, déposés au pied de l’arbre… Les yeux émerveillés des enfants qui ajoutent des lucioles à celles des guirlandes… Les emballages déchirés, les cris de joie à la découverte du beau joujou qu’ils ont vu en rêve ou de la superbe surprise concoctée par les grands-par… par le Père Noël (on a eu chaud, hein ?). Pendant ce temps, les adultes émus déballent leur gadget connecté, leur casque de vélo rétro-éclairé, ou leur tourniquette (compatible USB) pour faire la vinaigrette.
Et ça se finit toujours de la même façon : la caisse enregistreuse Plaie-Mobile reste muette. Le sabre laser redevient un morne bâton de plastique. Et la tourniquette refuse obstinément de tourniquer.
Tout ça, faute de piles.
C’était pourtant écrit -en tout petit- sur l’emballage : « piles AAA non fournies ». Évidemment, le 25 les boutiques sont fermées. Il faudra attendre le 26. Mais la magie sera évanouie…
Ce Noël 2022 ne fera pas exception à la règle. Le gros paquet, là, c’est un « Accord de Kunming-Montréal » fixant un « cadre mondial pour la biodiversité ». Ouvrons…
Ooooh ! « 30% de la planète protégée ». Quelle bonne idée. Mais… où sont les « dont 10 % en protection intégrale » initialement prévus ? Inutile de les chercher : l’Union européenne, à l’initiative de la France, a ferraillé pour que cette disposition soit oubliée.
Ooooh ! « 20 milliards d’aides internationales par an d’ici 2025, et au moins 30 milliards de dollars par an d’ici 2030 ».Fantastique ! Mais… les scientifiques, unanimes, estimaient que 100 milliards par an pour aider les pays du sud à réparer les ravages écologiques de ceux du Nord serait un minimum. Et les subventions publiques dommageables à la nature s’élèvent à au moins 1 800 milliards de dollars par an. Il est certes question de les « réduire d’au moins 500 milliards de dollars par an d’ici à 2030 », mais aucune obligation chiffrée n’est imposée à chacun des États qui distribuent ces subventions.
Ooooh ! « Restaurer 30% des terres dégradées ». Voilà encore une belle idée, Père Noël. Mais pourquoi avoir oublié de cartographier ces terres à réparer et de fixer un échéancier ?
Aaaah ! « Réduire les pesticides ». C’est écrit comme ça sur l’emballage. Oui mais sur la notice, c’est un peu différent : il est seulement question de « réduire les risques de pollution et l’impact négatif de la pollution de toutes les sources, d’ici 2030, à des niveaux qui ne sont pas nuisibles à la biodiversité ». Avec un tel charabia, susceptible d’interprétations et de discussions à l’infini, l’industrie de la mort lente a de beaux jours devant elle.
« Nous sommes très inquiets de la disparition dans le texte de toutes les références aux échéances et mesures destinées à rendre des comptes qui permettraient une mise en œuvre» réelle de l’accord par les pays, a déclaré en ouvrant le cadeau l’ONG The Nature Conservancy
En un mot : y’a pas les piles.
Et voilà. Il faut toujours qu’il y ait un grincheux pour gâcher la magie de Noël.
Joyeuses fêtes quand même !