Océan sidéré

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Thomas Pesquet s’est envoyé en l’air. Tout le monde attendait ça et la science s’esbaudit, au moins autant que les réseaux sociaux, car dans l’espace, on peut faire toutes sortes d’expériences dingues : observer l’impact de la micropesanteur sur un blob, déplacer des objets sans les toucher grâce aux ultrasons, ou encore analyser le sommeil des spationautes. Nul doute que notre quotidien s’en trouvera amélioré dans le futur. Mais à l’heure où la Thom’attitude nous gagne, voilà que l’ONU vient plomber l’ambiance : la deuxième Evaluation mondiale de l’Océan estime que les habitats marins pourraient bientôt ne plus être en mesure de nous aider à faire face au réchauffement climatique, tant nos activités les impactent. Quasi-doublement des zones mortes océaniques en 10 ans, 90 % des mangroves et 30 % des oiseaux de mer menacées d’extinction, pollution plastique incontrôlable… Pas besoin de regarder depuis l’ISS pour s’en rendre compte. Là est le malaise : si l’aventure stellaire nous fascine tous, la situation océanique (et donc planétaire), elle, nous concerne tous. Sans phytoplancton, ces micro-organismes végétaux à la base des écosystèmes marins, nous perdons les 2/3 de notre dioxygène. Nous ne respirons plus. D’aucuns répondent que l’exploration spatiale et la protection de notre environnement ne sont pas incompatibles. Loin de nous l’idée de comparer l’incomparable, et en fait, d’empêcher Thomas Pesquet de faire rêver les gens… Mais un anthropologue du futur ne retiendrait-il pas de l’Anthropocène qu’il fut surtout marqué par le pillage systématique des ressources et leur gaspillage dans des projets sidéraux? L’enjeu de ces derniers n’est-il pas finalement d’asseoir l’idée que, quelque effondrement que nous subissions, la technologie toujours nous sauvera de la finitude de notre Terre, car nous pourrons aller chercher les solutions ailleurs ? Pensons à ce qui pourrait être accompli pour sauver les océans avec un peu plus de discernement entre l’utile et le superflu, et une meilleure affectation de notre argent et notre science… A la recherche de solutions, disons, plus terre-à-terre !