La dernière livraison de la Lettre d’information de la Fédération nationale des chasseurs est divertissante et instructive. On démarre par les éructations rituelles de M. Schraen, le président de ladite fédération, qui vomit sa haine des « anti-tout » écolos -lesquels confondraient « action et interdiction »– avant de se draper dans une pathétique posture gaullienne (« Je compte sur vous. J’ai besoin de vous »), confirmant au passage que le ridicule est moins létal qu’un fusil de chasse.
La suite vaut qu’on s’y arrête. « La FNC, apprend-on, a souhaité inscrire dans la loi, lors de la dernière réforme de la chasse, l’obligation faite à tous les chasseurs, tous les 10 ans, de suivre une formation sécurité décennale (…). Cette formation dispensée en présentiel ou en ligne (…) a commencé depuis quelques mois malgré les difficultés liées à la crise sanitaire. L’objectif est de former 100 000 chasseurs par an.»
Voilà qui mérite d’être dégusté lentement : « la FNC a souhaité inscrire dans la loi » ? Il appartiendrait donc, désormais, à une fédération d’écrire la loi ? A quoi bon, dès lors, s’encombrer d’un parlement, d’un gouvernement, toutes ces institutions un peu désuètes pourtant réceptives, d’ordinaire, aux injonctions des tartarins de M. Schraen ? Quant à « l’objectif » de 100 000 formations par an, la belle affaire : il y a 1 million de chasseurs en France. A raison d’une formation tous les dix ans, il faut donc bien en former 100 000 par an. Mais si c’est dans la loi, comment peut-il s’agir d’un « objectif » et non d’une obligation ? En bref, la FNC écrit sa propre loi, et voit ensuite si l’objectif de l’appliquer peut ou non être atteint.
La rédaction de ce texte révèle un inconscient qui vaut son pesant d’aveu : la FNC se considère détentrice d’une « loi privée », qu’elle fixe et applique à sa guise. Étymologiquement, un privi-lège.