Cours d’eau à sec, sols agricoles en souffrance, la sécheresse a des conséquences délétères multiples. Elle perturbe aussi fortement les animaux sauvages, qui en plus de la soif, voient aussi leur reproduction ou leurs migrations bouleversées par le manque d’eau, alerte lundi la Ligue pour la protection des oiseaux.
Dans les 10 espaces naturels gérés par la LPO en Charente-Maritimes et en Vendée, où pendant le printemps et l’été 2022 les précipitations ont été 30% moins abondantes que la moyenne décennale, on « note une réelle perte de biodiversité: baisse du succès reproducteur, mortalité, baisse de fréquentation des sites… », souligne l’association. Sur certaines zones, les conséquences ont été particulièrement accablantes. Ainsi sur les réserves naturelles de Saint Denis du Payré et du Marais de la Vacherie, les effectifs d’oiseaux d’eau en migration ont été 19 fois moins importants en août 2022 par rapport à la moyenne des cinq années antérieures, avec la présence de seulement 64 individus contre environ 1.200 oiseaux en moyenne. Par ailleurs, en début d’hivernage, les anatidés (canards), étaient toujours six fois moins nombreux que les autres années, avec 1.400 oiseaux présents en décembre contre 8.300 en moyenne antérieurement. Pour certaines espèces, la reproduction a été ralenti voire inexistante en raison du stress lié au manque d’eau. C’est le cas pour la Guifette noire, espèce en danger en France et très dépendante des niveaux d’eau en début d’été, où aucune nichée n’a été observée en 2022 sur la réserve de la Vacherie, qui concentre l’essentiel des effectifs du Marais poitevin. Aucun petit non plus chez les Lestes à grand stigma, une espèce de libellule qui souffre déjà de la disparition progressive des zones humides, et les pélobates cultripèdes, un crapaud classé vulnérable en France, dans la réserve de Moeze-Oleron, en raison de l’assèchement précoce des cours d’eau. « Pour ces espèces qui ne se déplacent pas, c’est donc une perte nette et sèche » fortement dommageable, souligne Cédric Marteau, directeur du pôle protection de la nature à la LPO. Une mortalité « assez forte » des poissons a également été observée sur la zone d’Oleron, tandis que plusieurs insectes (araignées, criquets, invertébrés floricoles) n’ont quasiment pas été observés en raison d’un assèchement et d’une floraison très faible des prairies. « Sans eau, le milieu est moins accueillant, la nourriture est moins disponible, la prédation est plus forte », autant d’éléments qui impactent fortement la biodiversité, souligne M. Marteau. Ces constats prouvent que « les crises climatiques et l’effondrement de la biodiversité sont intimement liées et doivent être traitées conjointement », note la LPO. Combinée aux autres pressions pesant déjà sur la faune (agriculture intensive, chasse, pollution, prolifération d’espèces envahissantes), « des évènements de sécheresse durant plusieurs années de suite pourraient mettre directement en péril la survie de certaines espèces », ajoute l’association, alors que les nappes phréatiques étaient encore au plus bas fin mars, laissant craindre un nouvel été sec en France.