La Commission européenne a adressé jeudi un « dernier avertissement » à la Pologne qui a autorisé l’abattage d’arbres dans la forêt protégée de Bialowieza, avant une possible saisine de la Cour de justice de l’UE.
La démarche de Bruxelles a été aussitôt saluée par les écologistes polonais. Bruxelles demande expressément à Varsovie de « s’abstenir de pratiquer une exploitation forestière à grande échelle » dans l’une des dernières grandes forêts primaires d’Europe, protégée dans le cadre du réseau Natura 2000. La Commission donne un mois aux autorités polonaises pour répondre, et non deux comme c’est normalement l’usage, arguant d’une « menace de graves dommages irréparables au site ».
« Si la Pologne ne remédie pas à cette infraction à la législation de l’UE dans le délai prescrit, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) pourra être saisie », rappelle l’exécutif européen dans un communiqué. « Les réponses ne sont pas satisfaisantes pour le moment, a expliqué Enrico Brevio, porte-parole de la Commission pour l’environnement. Nous sommes toujours préoccupés », a-t-il ajouté. La Commission souligne que le 25 mars dernier, Varsovie a approuvé une modification du plan de gestion forestière concernant le district de la forêt et « permet le triplement de la récolte de bois ainsi que des mesures de gestion forestière active dans des zones qui étaient jusqu’à présent exclues de toute intervention ». La Pologne affirme procéder à des coupes pour stopper des attaques d’insectes xylophages, pour protéger le trafic routier et lutter contre les risques d’incendie.
Mais pour l’exécutif européen ces coupes « ne sont pas compatibles avec les objectifs de conservation du site et vont au-delà de ce qui est nécessaire pour garantir une utilisation sûre de la forêt ». Le réseau Natura 2000, auquel est rattachée la forêt de Bialowieza, vise à protéger des espèces et habitats menacés. Or Bruxelles estime que « l’exploitation forestière » du site peut provoquer « un appauvrissement irréparable de la biodiversité ». La Commission avait ouvert la procédure d’infraction en juin 2016 en adressant une lettre de mise en demeure à la Pologne. « Si le dossier va jusqu’à la Cour de justice de l’UE, ce sera extrêmement
embarrassant pour le gouvernement polonais », a réagi l’avocate Agata Szafraniuk, de l’ONG de défense de l’environnement ClientEarth qui s’est associée à six autres organisations pour dénoncer la situation à Bialowieza. « Toute la responsabilité de cette crise repose sur le ministre (Jan) Szyszko qui ne voit pas de différence entre un trésor environnemental qu’est la forêt de Bialowieza et une plantation d’arbres », a déclaré Robert Cyglicki, de Greenpeace Pologne, selon un communiqué commun de plusieurs organisations écologistes. Le lancement de la procédure par la Commission européenne « est une preuve définitive que le ministre Szyszko manipulait l’opinion publique depuis plus d’un an et n’a pas arrêté de mentir affirmant que les coupes d’épicéas doivent protéger les zones Natura 2000. On voit que c’est tout le contraire », a estimé quant à lui Przemyslaw Chylarecki de la Fondation Greenmind.