Trois questions à François Letourneux, Président de la Fête de la nature, Vice-Président du Comité français de l’UICN.
ANES : La Fête de la Nature sera célébrée du 22 au 26 mai pour la 13e année consécutive. Cette nouvelle édition souhaite mettre en avant la « nature en mouvement ». Pourquoi ?
François Letourneux : l’idée sous-jacente est que la biodiversité n’est pas juste un catalogue d’espèces, c’est avant tout un réseau de relations entre les espèces qui, avec le mouvement de l’évolution, se traduit par la sélection naturelle et l’adaptation. Dans un monde qui change, c’est important de montrer qu’on n’est pas en train de conserver sous cloche une nature immobile, mais qu’elle est en mouvement permanent. Notre action n’est plus simplement de conserver un état des choses, mais de rétablir les conditions de vie et de fonctionnement de l’ensemble du vivant, notamment en lui laissant le temps de l’adaptation.
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ANES : justement, entre le rapport alarmant de l’IPBES, le G7 environnement, les annonces d’Emmanuel Macron sur la biodiversité… la nature n’a jamais été – médiatiquement – autant sur le devant de la scène. Est-ce que cela signifie que les choses évoluent pour le mieux ?
François Letourneux : la situation bouge, c’est incontestable, mais assez vite ? C’est une autre question. Il y a un décalage entre les constats scientifiques et la prise de conscience et de décisions politiques. En revanche, pour des raisons qui tiennent soit à la volonté altruiste de panser la nature, soit à un « égoïsme sain » de l’homme – bien manger, profiter d’un bel environnement… -, de plus en plus de gens sont très sensibilisés à ces questions de biodiversité. On se rend compte qu’on ne peut plus séparer l’homme et la nature : nous faisons partie du réseau de relations entre les espèces, nous ne sommes que des gros mammifères qui dépendons totalement de notre environnement. C’est dans un échange réciproque de services et d’attentions que réside la solution.
ANES : Quelles sont les nouveautés de l’édition 2019 de la Fête de la Nature, et les envies pour les futur ?
François Letourneux : pour la première fois, la Fête de la Nature va mobiliser un nombre conséquent de particuliers qui ont aménagé leur jardin ou leur environnement proche pour accueillir la biodiversité, et qui souhaitent le faire découvrir à tous. C’est le cas notamment des Refuges LPO. Il y a de plus en plus de personnes fières de contribuer à réparer le tissu vivant de la planète, et qui souhaitent transmettre les bonnes pratiques. Il y a également cette année des manifestations qui ne sont pas ouvertes au public : l’administration pénitentiaire organise des manifestations pour les détenus. C’était une priorité pour nous depuis le début de la Fête de la Nature que les gens les plus privés de nature, comme eux, puissent en profiter. Ils auront des sorties en extérieur avec les familles, des sorties dédiées à l’aménagement de sites naturels, et des activités dans les jardins des prisons. Autre particularité de cette année : nous avons beaucoup de manifestations outre-mer. Enfin, nous avons développé le partenariat avec l’Agence Française de la Biodiversité (AFB) qui mobilise ses agents pour aider lors des manifestations. Concernant le futur, nous souhaitons internationaliser la fête. Cela a déjà commencé : elle s’est complètement implantée en Suisse et des manifestations apparaissent aux Pays-Bas et dans certains pays de l’Afrique francophone. Nous aimerions utiliser le Congrès mondial de l’UICN à Marseille l’an prochain pour faire passer le message : il faut qu’on célèbre partout le vivant dont nous faisons partie !
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Propos recueillis
par Jean-Baptiste Pouchain