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Collecter des carottes de glace des glaciers les plus exposés au changement climatique et les stocker en Antarctique pour les scientifiques des générations futures : tel est l’objectif d’ICE MEMORY, programme international de sauvegarde de la mémoire des glaciers.

Les glaciologues observent depuis des décennies l’impact de la hausse des températures sur la fonte des glaciers, qui constituent la mémoire des climats et environnements passés et permettent d’anticiper les changements environnementaux à venir. Face à ce constat alarmant, des glaciologues français de l’Institut des géosciences de l’environnement (IGE Grenoble) et leurs partenaires italiens ont lancé le projet ICE MEMORY en 2015, sous l’égide de la Fondation Université Grenoble Alpes et avec le patronage des commissions nationales française et italienne de l’UNESCO. Leur objectif principal : constituer en Antarctique la première bibliothèque mondiale d’archives glaciaires issues de glaciers menacés par le réchauffement climatique. Ces échantillons seront la propriété de l’humanité et une gouvernance pérenne veillera à leur utilisation exceptionnelle et appropriée, afin de permettre aux scientifiques des générations futures de réaliser des analyses totalement inédites, rendues possibles par l’évolution des technologies et des idées scientifiques.

Après une première expédition sur le Mont-Blanc en 2016 et un colloque international organisé à Paris en mars 2017, la deuxième expédition d’ICE MEMORY a pris le départ sur le glacier de l’Illimani (6400 m), en Bolivie, le 22 Mai, et s’achèvera le 18 Juin prochain. Situé juste au-dessus de la capitale bolivienne, La Paz, à la frontière entre le bassin humide amazonien et le plateau aride bolivien, le glacier de l’Illimani enregistre une multitude d’informations de sources différentes : évolution des précipitations, feux de végétation (côté amazonien), émissions de polluants d’origine humaine et pollution urbaine (côté « Altiplano »). Avec 140 mètres de profondeur et un écoulement réduit du glacier, le site préserve jusqu’à 18 000 ans d’archives climatiques et environnementales. Son étude permet ainsi de reconstituer le passé de cet environnement, de la dernière glaciation à nos jours.

Pendant le mois de Mai, l’équipe internationale de 15 chercheurs de l’Institut de Recherche pour le Développement (IRD), du Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS), de l’Institut de géographie de Russie et d’universités française et sud-américaine, accompagnée d’une réalisatrice de cinéma, s’est acclimatée aux hautes altitudes boliviennes. Désormais, deux groupes de chercheurs vont se relayer pendant un mois entre le camp de base (4500 mètres) et le sommet de l’Illimani. Leur objectif : réaliser des forages sur le glacier, jusqu’au socle rocheux, afin d’extraire trois carottes de glace d’environ 150 mètres chacune. Ces « carottes patrimoine » seront ensuite transportées de nuit et à dos d’hommes jusqu’au camp de base, puis par camion frigorifique jusqu’à La Paz et stockées au fur et à mesure dans un conteneur réfrigéré, avant d’être acheminées vers Grenoble.

L’analyse de l’une de ces carottes permettra d’identifier tous les traceurs chimiques accessibles avec les technologies d’aujourd’hui et constituer ainsi une base de données disponible pour l’ensemble de la communauté scientifique mondiale actuelle et future. Les deux autres carottes gagneront la base franco-italienne Concordia, en Antarctique, à partir de 2020 environ, et alimenteront la première bibliothèque mondiale d’archives glaciaires issues de glaciers menacés par le réchauffement climatique.

Suivre l’expédition sur le compte Facebook @ProtectingIceMemory.

Photographies et vidéos disponibles sur : http://fuga-media-stock.univ-grenoble-alpes.fr/