La déforestation favorise l’émergence de nouvelles maladies infectieuses

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Une étude internationale montre que la déforestation provoque une réduction des chaînes alimentaires en eaux douces, qui favorise le développement d’agents infectieux

Conduite par des chercheurs de l’IRD, de l’Inserm et de l’Université de Bournemouth, cette étude précise les liens entre la déforestation et l’émergence de nouvelles maladies infectieuses et me en évidence le fait que la réduction des chaînes alimentaires en eaux douces favorise le développement d’agents infectieux, comme Mycobacterium ulcerans en Guyane française, l’agent responsable de l’ulcère de Buruli. Ces résultats, qui permettent de mieux comprendre l’impact des changements environnementaux liés à l’activité humaine sur la santé, sont publiés le 7 décembre dans le journal Science Advances. Dans les zones intertropicales, le changement d’usage des sols, les modifications d’écosystèmes et d’habitats et l’érosion de la biodiversité sont responsables de l’émergence de nombreuses maladies infectieuses. Parmi ces facteurs, le déboisement des forêts primaires reste l’une des causes principales de l’apparition de nouveaux agents infectieux et de leur circulation épidémique dans les populations humaines . En effet, la déforestation a un impact sur les écosystèmes aquatiques, qui agissent comme interface entre les sédiments – riches en micro-organismes – et les habitats terrestres.

Les chercheurs ont observé, pendant trois ans, une vingtaine de sites aquatiques soumis à des pressions anthropiques différentes (déforestation, développement de l’agriculture) en Guyane française. Ils ont ainsi mis en évidence que la déforestation désorganise les communautés aquatiques autochtones d’eaux douces , entraînant une perte des fonctions écologiques. L’effondrement des réseaux trophiques favorise alors le développement d’espèces opportunistes hautement fécondes (« brouteurs », « suceurs », « filtreurs »), qui concentrent malencontreusement les bactéries ingérées lors de leurs repas. La mycobactérie responsable de l’ulcère de Buruli chez l’humain, M. ulcerans, est ainsi récupérée par ces «aspirateurs » et vient se concentrer dans les réseaux trophiques des sites les plus affectés par la déforestation et le développement agricole . Elle est ensuite transmise à l’humain, riverain du milieu aquatique infesté (mare, marigot) ou en contact avec l’eau lors des récoltes par exemple.

Les liens complexes entre milieux aquatiques, milieux terrestres et émergence de maladies infectieuses montrent clairement l’importance de bien comprendre la structure et la composition des communautés, les groupes fonctionnels qui y sont présents ainsi que leurs traits d’histoire de vie et leur distribution.

Les mécanismes écologiques mis en évidence dans cette étude pour l’agent causal de l’ulcère de Buruli peuvent rendre compte de l’émergence de nombreux autres micro-organismes d’origine environnementale. Ils sont ainsi fondamentaux pour notre capacité à prédire l’impact des changements environnementaux liés aux activités humaines sur les infections émergentes.

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