Par un arrêt du 28 avril 2021, le Conseil d’État précise les pouvoirs du préfet lorsqu’une dérogation à l’interdiction de destruction d’espèces protégées délivrée pour permettre l’exploitation d’une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE) est annulée par une décision judiciaire.
Une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE) est une installation qui peut présenter des dangers ou des nuisances pour la commodité des riverains la santé, la sécurité, la salubrité publique, l’agriculture, la protection de la nature et de l’environnement, la conservation des sites et des monuments. Le droit des ICPE est régi par le code de l’environnement. Le Conseil d’État est venu préciser par un arrêté du 28 avril 2021 les pouvoirs du préfet lorsqu’une dérogation à l’interdiction de destruction d’espèces protégées délivrée pour permettre l’exploitation d’une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE) est annulée par une décision judiciaire.
Dans sa décision, le Conseil d’État rappelle les raisons pour lesquelles il est intervenu : par deux arrêtés en date des 29 octobre 2015 et 9 mars 2018, le Préfet du Doubs (25) avait autorisé la société Maillard à exploiter une carrière de roches calcaires sur le territoire de la commune de Semondans. Pour permettre cette exploitation, le préfet de département avait – par un arrêté du 14 novembre 2014 – accordé à la société une dérogation à l’interdiction de détruire, altérer, dégrader des sites de reproduction ou des aires de repos concernant les 29 espèces animales protégées identifiées. La société avait donc entamé l’exploitation du site dans sa partie Sud et procédé au décapage total du terrain sur près de 4,5 hectares. Sollicitant la suspension de cet arrêté devant le juge des référés du tribunal administratif de Besançon, la société faisait valoir que plus aucune autorisation n’était requise au titre de la législation espèces protégées puisque le terrain, correspondant à la phase 1 de l’exploitation de la carrière, avait été entièrement décapé en exécution des dérogations obtenues et que la mise en demeure de déposer un nouveau dossier d’autorisation était ainsi entachée d’une erreur de droit. Faisant droit à cette argumentation, le juge des référés a ordonné la suspension de l’exécution de l’arrêté préfectoral du 4 octobre 2019 et le Ministère de la Transition écologique s’est pourvu en cassation contre cette ordonnance.
C’est dans ce contexte que le Conseil d’État a pris la décision de préciser par cet arrêté du 28 avril 2021, les compétences de l’autorité administrative lorsqu’une dérogation à l’interdiction de destruction d’espèces protégées délivrée pour permettre l’exploitation d’une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE) est annulée par une décision judiciaire. Il appartient ainsi au représentant de l’État de mettre en demeure l’exploitant de régulariser sa situation dans un délai déterminé. Et, le cas échéant, d’édicter des mesures conservatoires, qui peuvent aller jusqu’à la suspension de l’installation, jusqu’à ce qu’il ait statué sur une demande de régularisation. Si le préfet est saisi d’une telle demande, il doit statuer en tenant compte de la situation « de droit et de fait » applicable à la date laquelle il se prononce en tirant les conséquences de l’annulation de la dérogation « espèces protégées ». Ce qui peut le conduire à abroger l’autorisation d’exploiter l’installation classée.
Si les travaux ont déjà été réalisés et que les espèces protégées sont détruites alors, il incombe au préfet de rechercher si l’exploitation peut légalement être poursuivie en imposant des prescriptions complémentaires par une modification de l’autorisation environnementale ou une nouvelle autorisation, juge le Conseil d’État.