Neuf personnes, soupçonnées d’avoir participé à un trafic international de civelles, de jeunes anguilles, sont jugées depuis mercredi et pour trois jours devant le tribunal correctionnel de Nantes.
Les jeunes anguilles étaient pêchées dans l’estuaire de la Loire puis vendues à l’étranger dans le cadre d’un trafic très lucratif. « Je transportais juste », s’est défendu le plus jeune des prévenus, âgé de 24 ans, au sujet de trajets effectués vers le pays basque espagnol pour acheminer des civelles, très appréciées sur le marché asiatique. Les alevins d’anguilles étaient livrés par cargaisons de 100 kg en moyenne, selon le président du tribunal. « Le kilo de civelle se vend entre 250 et 400 euros au marché noir, a expliqué Me Rémi Lavigne qui défend l’une des parties civiles, l’association de protection de l’environnement Robin des bois. Ce n’est pas illégal de pêcher la civelle », rappelle-t-il. En effet, même si elle est protégée par la Convention sur le commerce international des espèces menacées (CITES), il est possible de vendre l’alevin d’anguille, à l’aspect cylindrique et transparent, à condition de respecter des règles et quotas. C’est l’imbrication d’acteurs qui agissent à la fois sur le marché légal et sur le marché noir qui rend le démantèlement de trafics particulièrement difficile. Dans ce cas, « ce sont des anomalies entre les montants déclarés par les mareyeurs et les montants que les pêcheurs déclaraient avoir vendus » qui ont mis les enquêteurs sur la piste, a expliqué Me Lavigne. Plus de 645.000 euros d’avoirs criminels avaient été saisis lors du démantèlement en juin 2016 à l’issue d’une enquête ouverte six mois plus tôt. « Le marché illégal, et je suis dans le métier depuis 15 ans, on en parle », s’est justifié un autre des prévenus, concernant des propos tenus alors qu’il était sur écoute. Il nie avoir réceptionné des livraisons de civelles illégales. Selon son avocat Me Victor Domingues, les quantités concernées dans ce dossier sont dérisoires par rapport au marché légal. « On reproche à mon client d’avoir livré environ 200 kg de civelles illégales, il en a vendu huit tonnes de façon légale au cours de la même année », a-t-il fait valoir. Patrick Lapoirie de l’Agence française pour la biodiversité (AFB), estime à une tonne la quantité totale de civelles concernées par ce trafic qu’il a contribué à démanteler. Les neuf prévenus sont jugés pour des faits survenus entre 2013 et 2016 et poursuivis pour trafic d’espèces protégées en bande organisée, travail dissimulé ou blanchiment. Le trafic d’espèces protégées en bande organisée est passible de sept ans d’emprisonnement.