La députée Delphine Batho, déçue de conclusions « pas à la hauteur » de la mission d’information sur les produits phytosanitaires, a annoncé jeudi sa démission de la vice-présidence. Pourtant, la Commission du développement durable a durci la législation sur les pesticides (mais elle n’est saisie que pour avis).
« Je viens de démissionner de la vice-présidence de la mission d’information sur les produits phyto-pharmaceutiques parce que le projet de rapport ne prône pas la sortie du glyphosate ni même son interdiction dans trois ans, uniquement l’interdiction pour un usage spécifique, a-t-elle annoncé lors d’une réunion de la commission du Développement durable. Continuer comme avant, ce n’est pas à la hauteur, alors que chaque jour apporte son lot de nouvelles études alarmantes sur l’impact des pesticides sur la santé humaine et sur l’effondrement de la biodiversité. C’est aussi très en deçà des engagements du président de la République sur la sortie du glyphosate », a déclaré Mme Batho à l’AFP.
Dans le projet de rapport, elle a également regretté des formulations affirmant par exemple que l’évaluation des effets sur la santé des pesticides restait délicate, ou l’absence de mention de l’affaire des « Monsanto Papers ». Aux yeux de cette vice-présidente du groupe socialiste, le seul point d’avancée dans le rapport est la création d’un fonds d’indemnisation des victimes des produits phytosanitaires, objet d’une proposition de loi PS adoptée début février au Sénat contre l’avis du gouvernement. En revanche, plaidant pour « l’heure de vérité », Mme Batho a fait adopter via un amendement l’interdiction du glyphosate à compter de juillet 2021, lors de l’examen, pour avis, du projet de loi sur l’agriculture en commission du Développement Durable. La mesure n’est donc pas encore intégrée au projet de loi. La rapporteure LREM avait initialement objecté que cela allait « peut-être un peu vite par rapport à la démarche du président et du gouvernement de conviction auprès des partenaires ». Preuve supplémentaire, selon l’ex-ministre PS, d’une « réécriture en cours de l’engagement présidentiel, une grande tergiversation dans les coulisses du pouvoir ».
Au cours de l’examen de la loi « Equilibre dabs le secteur agricole et alimentaire », les députés de la commission du développent durable, saisis pour avis, ont toutefois apporté plusieurs précisions au projet de loi, qui visent à durcir le régime d’utilisation des produits phytosanitaires. Ils ont notamment renforcé l’obligation de séparer les fonctions de conseil technique et de vente de produits phytosanitaires, prohibé « le fait de produire, stocker et vendre des produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives non approuvées par les autorités communautaires », ou étendu aux ministres de l’écologie et de la santé le pouvoir de s’opposer à la délivrance d’une autorisation de mise sur le marché de produit phytosanitaire (actuellement, seul le ministre de l’agriculture peut le faire).
Simultanément, plusieurs ONG de protection de la nature et d’autres organisations, dont la Confédération paysanne, one adressé une Lettre ouverte au gouvernement, dans laquelle elles critiquent l’avis récemment rendu par l’ANSES sur les néonicotinoïdes. « Sortir des néonicotinoïdes n’appelle pas le remplacement d’une technique par une autre pour un ravageur donné, mais l’installation d’un autre système de cultures qui permet de limiter l’usage de pesticides par un fonctionnement mieux relié à l’environnement naturel », écrivent notamment les signataires.