Confronté à de vives critiques sur le projet de loi de finances 2018, où la biodiversité semble oubliée, Nicolas Hulot assure qu’il vent en faire une « priorité » de son action.
Entre le ministre de la transition énergétique et les milieux de la protection de la nature, l’état de grâce prend l’eau ! En cause : le projet de loi de finances pour 2018 et en particulier le budget de son ministère, certes en augmentation, mais dont les moyens sont massivement affectée à l’action budgétaire au détriment de la biodiversité. Au point que la dotation budgétaire de l’Agence française pour la biodiversité (AFB) sera notamment assurée par une ponction sur les budgets des Agences de l’eau. Cette mesure a suscité une levée de boucliers de la part des Agences de bassin, évidemment, mais pas seulement. Tour à tour, France Nature Environnement (FNE), la Fédération des parcs naturels régionaux, celle des conservatoires d’espaces naturels, ont fait part de leur vive préoccupation. « Ne coulons pas les Agences de l’eau ! » plaide FNE. Pour son président Michel Dubromel, « force est de constater que malgré bon nombre d’efforts, il reste encore beaucoup à faire pour atteindre le bon état des eaux, que ce soit en termes de qualité de l’eau mais aussi en termes de disponibilité des ressources, d’adaptation au changement climatique, d’accompagnement des collectivités. Ces acteurs incontournables doivent pouvoir faire leur travail ; diminuer leurs moyens va totalement à l’encontre de cela ». Et Abelardo Zamorano, représentant de FNE au comité de bassin Seine-Normandie, précise : « France Nature Environnement a soutenu la création de l’Agence Française pour la Biodiversité, mais la dérive à laquelle nous assistons aujourd’hui fait ressortir les réserves que nous avions formulées à l’origine, sur l’utilisation des redevances eau pour des politiques de biodiversité ». Pour les présidents de la Fédération des conservatoires d’espaces naturels, Christophe Lépîne, et de la fédération des PNR Michaël Weber (lire entretien par ailleurs), « par un jeu complexe de prélèvements, de réaffectations et de plafonnements, le tour de passe-passe budgétaire appliqué aux Agences de l’eau ampute leurs capacités financières de 100 millions d’euros ! Comme d’autres collectivités et institutions locales, les Conservatoires des espaces naturels et les Parcs naturels régionaux travaillent en étroite relation avec les Agences de l’eau pour la mise en œuvre d’actions très concrètes sur les cours d’eau et les zones humides. Doit-on tirer un trait sur ces programmes en cours ? Les Fédérations des Conservatoires d’espaces naturels et des Parcs naturels régionaux de France en appellent désormais aux parlementaires pour réviser cette loi de finances afin de mieux préserver la continuité des actions menées en faveur de l’eau et de la biodiversité ».
Confronté aux critiques, Nicolas Hulot a profité le 5 octobre de la journée de la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB) pour déclarer « [Je] ferai [de la protection de la biodiversité], à parité avec le changement climatique, la priorité de mon action tant que je serai à ce ministère »,. L’érosion de la biodiversité est « un sujet tout aussi préoccupant et nécessaire » que le climat, a-t-il dit. « J’ai bien l’intention de mettre exactement au même niveau » les deux questions et de « profiter de l’opportunité que la lutte contre les changements climatiques nous offre pour que ce sujet se mette au milieu de l’écran radar de notre société », a ajouté Nicolas Hulot. La loi sur la biodiversité d’août 2016 « offre un nouveau cadre qui devrait nous permettre de relever les enjeux », a-t-il estimé. Nicolas Hulot entend faire de l’Agence française pour la biodiversité (AFB), qui pilote depuis janvier la préservation de la faune et de la flore, son « bras armé » pour « démultiplier » les actions. Son rôle de « rassembleur » va permettre de « déployer une gamme d’actions que je veux opérationnelles », a-t-il dit, sans revenir sur la question de son financement.
Hier à l’occasion d’un entretien au Parisien, le ministre a précisé ses intentions : « J’étudie une nouvelle source de financement qui permettrait de lutter contre l’artificialisation des sols et de financer la préservation de la biodiversité, nous explique le ministre de l’Ecologie. C’est une réflexion que j’ai proposée au Premier ministre, qui m’a invité à y travailler. » Nicolas Hulot souhaite « freiner les choses » en « mettant fin à cette frénésie souvent injustifiée ». Il estime que les surfaces naturelles « jouent un rôle important dans l’équilibre climatique, la préservation de la biodiversité et notre souveraineté alimentaire ».
Au niveau international, la France « va renforcer son soutien » à la Plateforme intergouvernementale sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES en anglais) qui rassemble des experts internationaux comme le Giec pour le climat. Elle va lui verser 900.000 euros au cours des trois prochaines années, a-t-il dit.