🔻 L’exploitation des forêts sous-marines de kelp est-elle durable?

Photo d'illustration ©monicore de Pixabay

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L’industrie des algues marines, basée sur la production d’alginate (un épaississant utilisé dans les industries alimentaire, textile et pharmaceutique) est en pleine expansion. Cette demande croissante a entraîné un boom de la récolte de kelp, des algues brunes géantes au large des côtes du Chili et du Pérou. Cependant, les scientifiques mettent en garde sur le fait que ces écosystèmes sont relativement peu étudiés et que leur exploitation pourrait entraîner des répercussions importantes.

Les forêts sous-marines de kelp dans les océans constituent un habitat précieux pour de nombreuses espèces. À tel point que les scientifiques du projet KELPER qui étudient ces écosystèmes estiment qu’elles rivalisent avec les grandes forêts tropicales pour la richesse de leur biodiversité. Les plus grandes réserves naturelles d’algues marines, majoritairement représentées par les kelps géants (Macrocystis pyrifera) et une autre espèce connue sous le nom de « huiro palo » (Lessonia trabeculata), se trouvent au large des côtes du Chili et du sud de l’Argentine selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO). Ces algues contiennent un hydrate de carbone appelé alginate qui est utilisé comme épaississant dans un grand nombre de produits de l’industrie alimentaire, tels que les desserts, les glaces, les produits laitiers, les sauces et les condiments. Il est également utilisé dans les industries textiles et pharmaceutiques, notamment dans la production de crèmes et de dentifrices. Avant que la demande de ces produits augmente, les kelps étaient ramassés sur les plages après que de fortes vagues les aient arrachés des fonds marins. Aujourd’hui, le marché est estimé à 1 milliard de dollars par an selon un rapport du projet KELPER, ce qui a poussé l’industrie à récolter l’algue directement à la source.

Les scientifiques attirent l’attention sur le manque d’informations sur ces écosystèmes relativement peu étudiés. Ils avertissent que la récolte du kelp en grandes quantités pourrait avoir des impacts écologiques importants. Le projet KELPER tente de savoir s’il est possible d’extraire les algues marines d’une manière qui n’a pas d’impact négatif sur les écosystèmes dans le but de répondre à la demande sur le marché tout en préservant la biodiversité marine. Ils cherchent également à évaluer la résilience des forêts laminaires et leur capacité de résilience après exploitation.

Grâce à une batterie de tests, les scientifiques ont observé qu’une parcelle donnée de forêt de kelp met environ quatre ans à se reconstituer après avoir été récoltée. Ce délai est considéré comme lent pour une espèce qui forme un habitat. Environ 110 espèces vivent exclusivement à la base de ces algues, dont plusieurs présentent un intérêt commercial, comme l’ormeau du Chili (Concholepas concholepas) et l’oursin du Chili (Loxechinus albus). Alejandro Pérez Matus, professeur adjoint au département d’écologie de l’université catholique du Chili et chercheur principal du projet KELPER explique au site d’informations Mongabay qu’il a été prouvé que ces espèces diminuent en l’absence d’algues, ce qui a un impact sur la pêche. Il ajoute qu’il existe déjà des endroits au Chili où les impacts négatifs de la pêche à la source des algues brunes sont apparents, mais que l’ampleur du problème n’a pas encore été quantifiée.