Voilà, les lampions sont éteints, les (quelques) invités repartis de Marseille : la « fête » de la biodiversité est terminée, revenons aux affaires courantes. Électorales, s’entend. À quelques mois de la présidentielle et des législatives, le gouvernement innove pour séduire les franges les plus écologiquement réactionnaires de l’électorat. Ainsi, L’État va proposer des contrats de trois ans aux producteurs et coopératives agricoles pour les inciter à faire baisser le taux de nitrates dans l’eau et lutter ainsi contre la prolifération des algues vertes dans les baies du Finistère et des Côtes d’Armor. Il s’agit de les « accompagner financièrement » en espérant qu’ils modifieront (un peu) leurs pratiques. Le gouvernement vient d’inventer la doctrine « pollueur payé ». Félicitations…
Simultanément, le ministère de l’écologie défie les justices française et européenne : en dépit de décisions de la Cour de justice de l’Union européenne et du Conseil d’État, il annonce un décret ré-autorisant les chasses « traditionnelles » aux oiseaux, malgré leur caractère barbare et non-sélectif.
Ce faisant, les stratèges macroniens misent sur une caractéristique sociologique que les politologues appellent la « mobilisation différentielle » : certes les chasseurs sont ultra-minoritaires en France (1 million de permis), mais ils sont susceptibles de faire de la chasse la motivation principale (voire unique) de leur choix électoral. Alors que les défenseurs de la nature, infiniment plus nombreux, se déterminent sur un grand nombre de critères, dont la chasse n’est pas le principal. A court terme, le choix est électoralement payant.
A plus long terme, évidemment, les coûts sont élevés. D’après une étude approuvée par la revue The Lancet Planetary Health , 45 % des jeunes sondés dans dix pays affirment que l’écoanxiété affecte leur vie quotidienne. Et les trois quarts des 16-25 ans dans dix pays, du Nord comme du Sud, jugent le futur « effrayant ». « Si la jeunesse n’a pas toujours raison, la société qui la méconnaît et qui la frappe a toujours tort », proclamait naguère François Mitterrand.
Mais qu’importe aux caciques la lucidité de la jeunesse ? Après eux, le déluge.