Vous connaissez les néonicotinoïdes, ces substances phytosanitaires aux intitulés au moins aussi barbares que leurs conséquence sur la biodiversité ? La semaine dernière, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) nous a gratifié d’une révélation aux relents de truisme : il existe des alternatives écolos (22, apparemment) aux néonic’ utilisés pour la culture de la betterave. Oui, rappelez-vous, après que leur toxicité pour les abeilles a été avérée et leur interdiction, proclamée le 1er septembre 2018, le gouvernement avait sorti de son chapeau fin 2020 une ré-autorisation de 3 ans pour les betteraviers à qui les pucerons vecteurs de jaunisse collaient une frousse bleue. Et donc, voici que l’Anses (entachée d’accusations de manquements au code de déontologie et de potentiels conflits d’intérêts, mais c’est une autre histoire) nous balance qu’il y a moyen de faire autrement. Elle l’avait d’ailleurs déjà signifié, timidement, dans un avis de 2018 statuant que, pour une « majorité d’usages », il existait des alternatives « suffisamment efficaces et opérationnelles ». La monoculture industrielle, qui ne souffre la contrariété, a nié en bloc : « il n’existe pas à ce jour de traitements à l’efficacité comparable aux néonicotinoïdes opérationnels à grande échelle », avait plaidé l’Institut technique de la betterave.
Avec un peu plus d’assurance, l’Anses affirme aujourd’hui que 22 solutions peuvent être mises en place. Parmi elles figurent : « le paillage et la fertilisation organique », « des insectes prédateurs […] des pucerons », « des huiles végétales ou minérales » ou encore « des méthodes culturales combinant la culture de la betterave avec d’autres plantes », le tout en combinaison « pour atteindre une efficacité suffisante ». En d’autres termes, l’Agence préconise de faire du compost, du biocontrôle et de la polyculture. A ce compte, elle aurait pu rajouter la plantation de haies, la rotation des cultures et tout autre levier agronomique visant l’équilibre du système plutôt que sa disruption par le biais de produits chimiques exterminateurs. « On est gouverné par des lascars qui fixent le prix de la betterave et qui ne sauraient pas faire pousser des radis », disait Michel Audiard. De son côté l’Anses, à défaut d’inventer le fil à couper le beurre, (re)découvre l’agroécologie. C’est déjà pas si mal.