La Papouasie accorde des permis de conversion forestière qui menacent la biodiversité

Photo d'illustration ©BackyardTrickz de Pixabay

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Après s’être installées dans les forêts de Sumatra et Bornéo en Indonésie, des industries de production de matières premières veulent s’implanter en Papouasie. Là-bas, les autorités délivrent des permis qui leur permettent de défricher des forêts et y développer des plantations d’huile de palme.

Au cours des dernières décennies, l’Indonésie a connu un véritable boom des matières premières. Huile de palme, charbon, pâte de bois, l’établissement de concession pour produire ces matériaux a détruit une grande partie des forêts de Sumatra et de Bornéo à l’ouest de l’Indonésie. Ces industries veulent à présent continuer à s’étendre et souhaitent s’installer en Papouasie. Un rapport de 11 organisations non-gouvernementales locales relève qu’une surface de 1,1 million d’hectares de forêt naturelle sera convertie en plantations de palmiers à huile avec l’autorisation du gouvernement. Comme le précise le site d’informations Mongabay, ces autorisations sont connues sous le nom de « permis de conversion des forêts ». Ils sont requis par la loi pour permettre l’établissement de plantations et de projets d’infrastructures dans des zones forestières. Ces permis légitiment aux yeux du gouvernement le défrichement des forêts.

La Papouasie possède une des biodiversités les plus riches de la planète, abritant au moins 20 000 espèces végétales, 602 oiseaux, 125 mammifères et 223 reptiles. Les autorisations accordées par les autorités pour la conversion des forêts pourraient, selon les ONG, s’avérer catastrophique pour les écosystèmes de l’île. D’après Mongabay, historiquement, la délivrance de permis de conversion forestière a été suivie dans une faible mesure par la déforestation, mais les nouvelles réglementations pourraient signifier un taux de défrichement encore plus élevé. De 1992 à 2019, le gouvernement a délivré des permis pour 1,57 million d’hectares de zones forestières, dont 1,3 million d’hectares pour des plantations. En 2019, 11 % de ces 1,3 million d’hectares avaient été déboisés, ce qui représente près d’un tiers de la déforestation totale en Papouasie, soit 663 443 hectares au cours des deux dernières décennies. Dedy Sukmara, chercheur à l’ONG environnementale Auriga, membre de la coalition, a déclaré à Mongabay que les nouvelles réglementations fixant un délai plus strict pour le début de la mise en culture des terres par les détenteurs de licences feraient que les entreprises déboiseraient leurs concessions plus rapidement afin d’éviter des sanctions.

Le Ministère de l’Environnement et des Forêts de Papouasie a publié ses propres données pour répondre au rapport des ONG et montrent qu’il reste au moins 1,26 million d’hectares de forêts naturelles dans les zones qui ont déjà été affectées aux plantations en janvier 2021. « Ces forêts sont restées largement intactes, avec seulement 2 645 hectares de déforestation identifiés par le ministère d’ici janvier 2021 », indique Mongabay. Le ministère a assuré qu’il surveille cette tendance dans le cadre d’efforts plus larges faisant suite à un moratoire gouvernemental de 2018 sur la délivrance de nouveaux permis pour les plantations de palmiers à huile. Le moratoire a été imposé pour améliorer la durabilité de l’industrie et prévoit également un examen des permis existants.

Pour protéger les forêts pour lesquelles des permis de conversion ont déjà été délivrés après l’expiration du moratoire à la fin de cette année, le gouvernement devrait imposer une interdiction générale du défrichement de toutes les forêts naturelles, que des permis aient été délivrés ou non, d’après Dedy Sukmara.