Que savez-vous des zones humides ?

Photo d'illustration ©Pmau-Wikimedia

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Chaque année, la Journée mondiale des zones humides est célébrée le 2 février pour commémorer la signature de la Convention sur les zones humides (ou Convention de RAMSAR), le 2 février 1971 dans la ville iranienne de Ramsar. En 2021, le thème de cette journée est : « Zones humides et eau ».

La Convention de RAMSAR, entrée en vigueur en 1975 et ratifiée par la France en 1986, est le fruit d’une rencontre en 1971 entre 18 pays  qui visait à protéger les zones humides. Depuis cette réunion, le 2 février marque la Journée Mondiale des zones humides, soit des espaces où l’eau est présente en quantité importante et de façon prolongée en surface ou dans le sol (marais, étangs, prairies, forêts, milieux alluviaux, roselière…) Ces milieux sont identifiés par deux critères majeurs : des traces de saturation régulière en eau dans le sol et la présence de plantes qui se développent en conditions d’humidité importantes.

Ces espaces sont considérés comme des « couteux suisses » tant les services rendus sont variés. Le Conservatoire d’espaces naturels de Haute-Savoie indique dans un communiqué que les zones humides « c’est une éponge qui stocke et restitue l’eau, et permet donc de limiter les inondations et les sécheresses. C’est un filtre qui épure les eaux. Si les océans et les forêts sont souvent comparés aux « poumons » de la planète, les zones humides en sont les « reins ». Elles jouent un rôle essentiel dans l’approvisionnement en eau en participant activement à l’épuration de la ressource. C’est un nid de biodiversité qui abrite une grande diversité d’espèces (plus de 30% des plantes remarquables et menacées en France, ainsi que 50% des espèces d’oiseaux). C’est le troisième écosystème au monde le plus riche biologiquement, derrière les récifs coralliens et la forêt équatoriale. C’est un atout contre les changements climatiques car les zones humides absorbent le carbone et constituent des îlots de fraicheur ». Dans les départements de Savoie et de Haute-Savoie, la surface de zones humides inventoriée par les deux Conservatoires d’espaces naturels en 2020 est de 24 230 ha, soit seulement 2,2 % de la superficie totale du territoire des deux départements. 

Certaines zones humides comme c’est le cas de « Bar al Hikman » dans le Sultanat d’Oman, sont de vrais havres de paix pour la faune sauvage. Barr Al Hikman est une zone humide paradisiaque très importante pour les oiseaux migrateurs. Cet espace est connu pour offrir de bonnes ressources alimentaires à des centaines de milliers d’oiseaux d’eau migrateurs qui dépendent de cette oasis côtière lors de leur passage au-dessus de la péninsule arabique. En 2017, une équipe de Wetlands International – organisation à but non lucratif qui s’intéresse à la protection des zones humides et à leur gestion durable – a trouvé plus d’un demi-million d’oiseaux hivernant à Barr Al-Hikman, et a enregistré un total de 63 espèces d’oiseaux d’eau sur le site en 2017-2019. Une des espèces dépendantes de cette zone humide est le Bécasseau maubèche, classé quasi-menacé sur la liste rouge de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN)

En France, la loi définit une zone humide : « On entend par zone humide les terrains, exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d’eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire, ou dont la végétation, quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles pendant au moins une partie de l’année ». Le pays compte 50 sites inscrits sur la liste des zones humides d’importance internationale (un quart se trouve en Outre-mer). Cela représente 3,7 millions d’hectares.  À l’occasion de la journée mondiale, plusieurs organisations et associations proposent des animations de sensibilisation à la protection des zones humides et alertent sur les menaces qui pèsent sur ces milieux riches en biodiversité.

Dans le bassin Seine-Normandie, très urbanisé, les zones humides ne représentent plus que 5,9% du territoire.  L’Agence de l’eau Seine-Normandie a inscrit la protection de ces espaces, atouts importants pour atténuer le changement climatique, au cœur de son programme « eau et climat » sur la période 2019-2020. Elle incite les collectivités et les associations à redonner leur place aux zones humides, en proposant un taux de 80% de subvention pour les études et le suivi, l’acquisition foncière, la restauration ou l’animation en faveur de la reconquête des zones. Afin de célébrer la Journée Mondiale consacrée à ces milieux, l’agence propose une campagne de communication #ilslontfaitpourquoipasvous, reposant sur des films témoignages d’acteurs engagés sur le bassin, donne la parole au marais du petit Broué dans la Marne.

De nombreux programmes ont été mis en place pour protéger les zones humides. C’est le cas du programme européen Life Artisan « Accroître la résilience des territoires au changement climatique par l’incitation aux solutions d’adaptation fondées sur la nature » ou le programme français  « Territoires et engagés pour la nature » qui s’adresse en partie aux collectivités afin de renforcer leurs connaissances sur ces milieux pour mieux les protéger ou les restaurer.

Malgré ces programmes de protection, les zones humides et les espèces qu’elles abritent sont menacées par les activités humaines et le changement climatique. Un collectif de chercheurs du Centre National de Recherche Scientifique (CNRS), associé à l’association de protection de la nature Cistude Nature, a conduit une étude génétique sur les populations de lézards vivipares. Ces espèces, dépendantes des milieux humides et frais ont été étudiées sur un gradient altitudinal partant des zones humides des plaines jusqu’aux prairies d’altitude et tourbières des Pyrénées. Les résultats montrent que les lézards vivipares sont bien moins abondants dans le massif landais. Ils ont également un patrimoine génétique nettement différent des autres populations et un plus fort taux de consanguinité qui coïncide avec une interruption du flux de gènes entre les populations. D’après les chercheurs, il y a un risque imminent d’extinction locale. Ce risque d’extinction est dû à la fragmentation des zones humides du massif landais dans lesquelles une partie de la population de ces lézards ont élu domicile. Il semblerait que le changement climatique est également un impact sur ces espèces. Des observations réalisées dans le cadre du programme « Les sentinelles du climat » révèlent d’ailleurs que les lézards vivipares y sont bien moins actifs lors des années chaudes et sèches comme 2017, laissant penser qu’ils se mettent alors à l’abri.

Campagne #ilslontfaitpourquoipasvous

Consulter le rapport sur les populations de vivipares