A la veille de la journée de mobilisation des agriculteurs français à Paris, plusieurs milliers d’agriculteurs allemands ont convergé en tracteur mardi à Berlin, deux mois après l’annonce d’un vaste plan destiné à réduire l’usage des pesticides et engrais chimiques dans les exploitations du pays.
« Sans agriculteurs, pas d’avenir », « Agriculteurs ruinés, nourriture importée »… Les pancartes accrochées derrière les tracteurs reflétaient les inquiétudes des manifestants. Ils craignent que les nouvelles réglementations environnementales n’accroissent leurs difficultés économiques, dans un contexte de concurrence internationale. « Les agriculteurs allemands ont besoin de protection et de perspectives d’avenir, plutôt que de régulations excessives et d’interdictions », a ainsi argué l’Organisation des agriculteurs allemands (DBV), principal syndicat agricole du pays. C’est la troisième fois qu’une telle manifestation est organisée. Les agriculteurs demandent une « refonte » du « plan de protection des insectes », annoncé début septembre par le gouvernement d’Angela Merkel. Fruit d’un compromis entre les ministères de l’Environnement et de l’Agriculture, ce programme implique notamment une interdiction de l’usage du glyphosate d’ici 2023 et l’interdiction, avant 2021, de l’usage d’herbicides et insecticides « ayant un impact sur les insectes »dans les zones « vulnérables d’un point de vue écologique »,et des restrictions dans l’usage des engrais minéraux. [ihc-hide-content ihc_mb_type= »show » ihc_mb_who= »1,2,3,4,5″ ihc_mb_template= »1″ ]
« De nombreux pesticides et pratiques interdites ici sont autorisés ailleurs dans l’Union Européenne ou dans le monde. Or, nous sommes en concurrence avec les produits issus de ces pays », regrette Norbert Prkle, exploitant agricole en Saxe. « J’ai de moins en moins confiance en mon avenir », renchérit René Wessler, manifestant de 24 ans. Huée plusieurs fois, la ministre de l’Agriculture Julia Klöckner a défendu sa politique devant les manifestants, porte de Brandebourg en plein centre de Berlin près du Parlement, tout en appelant à « renouer le dialogue » entre la société et les agriculteurs. Depuis plusieurs mois, les organisations du secteur se plaignent d’un manque de considération de la part d’une opinion publique de plus en plus sensibilisée aux questions environnementales. « Les citadins ne nous comprennent plus, car ils n’ont plus aucun contact avec nous »,r egrette Hubert Oing, 47 ans, exploitant en Basse-Saxe. Cette fracture s’est récemment illustrée avec une pétition visant à « sauver les abeilles » contre les pesticides, qui a récolté cette année plus de 1,8 million de signatures en Bavière, poussant le gouvernement régional à s’engager sur la question malgré l’opposition des organisations agricoles locales. Selon une étude parue fin 2017 et basée sur des captures réalisées en Allemagne, l’Europe a perdu près de 80% de ses insectes en moins de 30 ans, contribuant à faire disparaître plus de 400 millions d’oiseaux.
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