Quand les oiseaux mâles se donnent en spectacle pour séduire les femelles

Photo d'illustration ©Francesco Veronesi - Wikimedia - license CC2.0

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Entre chant, danse et acrobaties, certains oiseaux ne manquent pas d’imagination et de compétences pour attirer une femelle. Le manakin à col d’or et le Ménure Superbe sont deux espèces présentant des comportements de séduction étonnants qui leur permettent d’assurer avec succès la reproduction.

Darwin avait une théorie selon laquelle l’évolution des comportements élaborés et des traits morphologiques chez les animaux augmente leurs chances d’attirer le sexe opposé, ce qui conduit au succès de la reproduction. La règle se confirme dans tout le règne animal, des cerfs mâles avec leurs gigantesques bois aux oiseaux avec leurs danses d’accouplement complexes et leurs plumages somptueux et colorés. Certaines espèces cependant présentent des compétences inégalables. C’est le cas du Manakin à col d’or (Manacus vitellinus) et du Ménure Superbe (Menura novaehollandiae). Comme son nom l’indique, le manakin à col d’or a le flanc d’un jaune éclatant. Chaque année, les mâles se réunissent au mois de juin pour se peloter la gorge, soulever leurs ailes et les frapper ensemble à un rythme effréné allant jusqu’à 60 battements par secondes. Une fois qu’il a attiré l’attention d’une femelle, le manakin à col d’or se lance dans un spectacle d’acrobaties mêlé à d’autres claquements d’ailes cadencés, et va même parfois jusqu’à entreprendre un saut périlleux arrière. Impressionnant n’est-ce pas ?

Afin de comprendre pourquoi les manakins font toutes ces choses étonnantes, des travaux menés par Ignacio Moore de l’Institut polytechnique et de l’Université d’État de Virginie, ont analysé les génomes de cet oiseau. Les chercheurs ont exploré les gènes qui déterminent ces comportements et leurs traits élaborés. Lors d’une conférence de la Society for Integrative and Comparative Biology en février 2021, l’équipe a présenté quatre génomes de manakin qui viennent s’ajouter à deux autres génomes déjà publiés. Elle a également identifié les gènes actifs dans les muscles et le cerveau des oiseaux qui pourraient rendre ces prestations possibles. En cartographiant les traits et les gènes dans l’arbre généalogique des manakins, les scientifiques ont retracé les changements génétiques progressifs qui ont conduit aux représentations les plus élaborées. Ils ont noté que leurs ancêtres ont modifié leur régime alimentaire, passant des insectes aux fruits. Les chercheurs soupçonnent alors que le passage à une source de nourriture plus disponible et plus abondante a donné aux mâles un supplément d’énergie pour se trouver des compagnes et les séduire.

Chez l’homme comme chez l’animal, la sélection sexuelle est assez répandue. Dans la compétition entre individus d’une même espèce en vue de l’accouplement, la sélection sexuelle désigne l’évolution de certains traits héréditaires de façon indépendante des facteurs de survie propres. Par exemple, le plumage de parade nuptial du paon est un réel atout de séduction bien qu’il soit handicapant pour échapper aux prédateurs. Parmi ces animaux au charme stupéfiant, il y a le ménure superbe. Cet oiseau est reconnu dans le monde entier comme le plus grand imitateur. Il est capable de reproduire le chant d’autres espèces, mais aussi des sons plus artificiels qu’il a entendus, comme des bruits de tronçonneuses, d’obturateurs d’appareil photos et même les alarmes de voitures. Une étude parue en février 2021 dans Current Biology montre que le ménure mâle utilise ses compétences lors de séances d’accouplement et que ce mimétisme vocal assurerait le succès de reproduction. Pendant la saison des amours, l’espèce endémique du sud-est de l’Australie prépare la scène sur laquelle elle se produira au moment de sa grande représentation. Le mâle défriche une parcelle de forêt et construit des monticules sur lesquelles il se tiendra pour danser, déployer sa longue queue et chanter. Pour être certain que la partenaire qu’ils visent reste jusqu’à l’accouplement, les ménures incorporent, dans leur concert, le chant de prédateurs. Ils leur font croire qu’il y en a un à proximité et qu’elles seraient plus en sécurité à leurs côtés. Ils utiliseraient même cette technique pendant l’accouplement. Selon les scientifiques, cette ruse leur permet d’augmenter leurs chances de s’accoupler avec succès.

Article de Science sur les génomes des manakins à col d’or

Voir l’étude sur le chant des Ménures superbes