L’interdiction de régulation en eaux libres des cormorans, une espèce protégée prédatrice de poissons, suscite une vive colère de la Fédération des pêcheurs de loisir qui a annoncé attaquer le décret du gouvernement et séquestrer les redevances pour la protection des milieux aquatiques.
Dans un arrêté triennal pris le 19 septembre, le gouvernement a pour la première fois limité aux zones de piscicultures les dérogations à l’interdiction de destruction du grand cormoran terrestre (Phalacrocorax carbo sinensis), une espèce protégée au niveau européen depuis 1979. L’arrêté fixe des quotas départementaux, sur autorisation des préfets, pour un total national de 83.676 cormorans tués jusqu’à l’été 2025, excluant tout tir sur les étangs et rivières hors piscicultures. Cette décision fait suite aux victoires obtenues par la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO), qui a fait annuler l’arrêté précédent dans une quinzaine de départements, faute de preuves scientifiques suffisantes sur l’impact du grand cormoran sur les populations de poissons. « Les administrateurs de la FNPF ont décidé à l’unanimité d’attaquer l’arrêté », a annoncé dans un communiqué la Fédération Nationale de la Pêche en France et de la protection du milieu aquatique (FNPF). « Ils ont également approuvé la séquestration de la Redevance Milieux Aquatiques versée par les pêcheurs », soit environ 8 millions d’euros par an, « et du règlement des baux de pêche publics » (le droit de pêche sur le domaine public, ndlr). Les grand cormorans « consomment entre 300 et 500 grammes de poisson par jour chacun en s’attaquant aux espèces disponibles dont les migrateurs, le brochet, l’ombre commun et la truite », pour certaines menacées, s’inquiète la FNPF. « Le sujet est explosif au sein des structures de pêche de loisir, prêtes à en découdre ! », met en garde la FNPF, forte de 1,5 million de pêcheurs membres et qui siège dans les principales institutions environnementales françaises. « Nous ne comprenons pas cette décision décorrélée de la réalité terrain », s’émeut Claude Roustan, président de la FNPF. Auprès de l’AFP, il a déclaré voir dans cette décision un « mépris » de l’Etat pour le travail de protection des cours d’eau et de la faune piscicole réalisé par les associations de pêcheurs. « On ne parle ici que de régulation. Est-ce qu’un oiseau est supérieur à un poisson en termes de biodiversité ? », s’est interrogé M. Roustan, qui a demandé à être reçu par le président Emmanuel Macron.