Smartphone en main, tout le monde peut aider à préserver les oiseaux (2 mn 30)

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« Une mésange ! »: embusquée derrière une fenêtre de son pavillon, Lisa démarre 5 minutes d’observation des oiseaux sur ses deux mangeoires. Objectif: découvrir si la mésange préfère les graines « à emporter », si le pinson aime les repas entre amis ou si le chardonneret est un gourmand agressif.

Grâce au jeu sur smartphone et tablette BirdLab, Lisa Garnier immortalise pendant l’hiver les arrivées et les départs de 24 espèces d’oiseaux en quête de graines de tournesol: avec ses doigts, elle déplace les beaux avatars des volatiles, reproduisant en temps réel les déplacements des vrais. « On connait mal le comportement des oiseaux, c’est pourtant essentiel pour déterminer ce qui leur est favorable et pour pouvoir imaginer comment les préserver », explique à l’AFP Sébastien Turpin, l’un des chef de projet de BirdLab, le programme de sciences participative du Muséum national d’histoire naturelle. Adepte du jeu scientifique depuis 5 ans, Lisa Garnier espionne régulièrement chardonnerets, verdiers, pinsons, mésanges et autre rouge-gorges  picorant les graines de tournesol dont elle recouvre ses deux mangeoires faits 

mains. « En jouant à Birdlab, j’ai découvert les différents traits de caractère des oiseaux, lesquels étaient timides, qui poussait qui », explique la quadragénaire.  Une étude choc du CNRS et du Muséum d’histoire naturelle avait révélé l’année dernière le déclin vertigineux des oiseaux des milieux agricoles (- 30% entre 1989 et 2017).  Un déclin qui touche aussi les oiseaux des villes, comme les moineaux parisiens, et même depuis 2005 les oiseaux « généralistes », qui vivent dans tous types de milieux et qui contrebalançaient auparavant la disparition des autres.  Depuis le lancement du jeu en 2014, les fans de BirdLab ont réalisé 30.000 parties de 5 min soit l’équivalent de 200 jours d’observation non stop, une manne d’informations précieuses pour les chercheurs. « Plus il y aura de données, plus nous pourrons être précis dans nos analyses, explique Sébastien Turpin. Car s’il a été démontré que nourrir les oiseaux était plutôt bénéfique à leur survie, que ça les aidait vraiment à passer l’hiver » encore faut-il le faire intelligemment, en connaissance de cause.

Depuis son poste d’observation, à un mètre d’une fenêtre pour ne pas leur faire peur, Lisa a découvert que les mésanges scrutaient les lieux de loin avant de s’approcher et préféraient la mangeoire de gauche, plus proche de la haie. Que les verdiers arrivaient en troupe. Les tourterelles (qu’elle n’aime pas beaucoup) ne repartent qu’une fois les mangeoires nettoyées de toutes graines. Les rouge-gorges ne cessent de surveiller leurs arrières. Les pinsons mâles et femelle ne mangent généralement pas sur la même mangeoires mais tous sont hésitants, « on a envie de les aider, de leur dire +vas-y+ », s’amuse la mère de deux enfants. Dans son pavillon de banlieue parisienne, les oiseaux ne sont pas les seuls à être chouchoutés: Bidule et son copain, deux cochons d’inde, ne manquent pas d’espace. Un chat se balade librement entre les étages. Gégé le poisson rouge partage son aquarium avec une anguille et des poissons nettoyeurs. Dans le jardin, tout n’est pas tondu, un arbre mort abrite lichens et insectes, les thuyas nourrissent les mésanges. Car « l’intérêt des sciences participatives c’est bien sûr de contribuer à la recherche, à l’amélioration des connaissances sur la biodiversité mais elles permettent également aux participants de mieux connaître les espèces et de faire naître l’envie de les préserver », explique Sébastien Turpin.