Un champignon invasif provoque d’immense dégât au peuplement de frênes français, notamment en Lorraine. L’Inra étudie la maladie afin de d’enrayer son impact.
La charalose du frêne est une maladie due à un champignon invasif et originaire d’Asie, Hymenoscyphus fraxineus, qui s’attaque à la cinquième essence feuillue des forêts françaises. Apparue en Pologne au début des années 1990, la chalarose a été détectée en France pour la première fois en 2008. Les arbres atteints montrent des symptômes multiples sur les feuilles, les rameaux et à la base du tronc. Les dégâts sont considérables sur deux des trois espèces poussant spontanément en France : le frêne commun (Fraxinus excelsior) et le frêne à feuilles étroites ou frêne oxyphylle (Fraxinus angustifolia). Les jeunes plants sont particulièrement sensibles et meurent rapidement. Progressant vers le sud et l’ouest de la France depuis l’Alsace et la Lorraine, la maladie se propage à vitesse constante de 60 km/an, soit environ un département par an. En Lorraine, tous les frênes sont touchés, mais à un degré très variable. Le suivi de l’épidémie est réalisé de façon très précise grâce au réseau des correspondants-observateurs du Département de la santé des forêts, en collaboration avec l’unité « Interactions Arbres/Micro-organismes » (IaM) de l’Institut National de la recherche agronomique (Inra) de Nancy. « Les chercheurs nancéiens ont montré que la température était un facteur très important, explique l’Inra dans un communiqué. En été, au-dessus de 35°C, le champignon meurt. […] Dans le Sud-Est, le champignon a arrêté sa progression entre Lyon et Montélimar car les températures sont trop élevées. » Par ailleurs, en mélange avec d’autres essences, le frêne est moins impacté par la charalose : en-dessous de 1/4 ou 1/5 de frênes dans le peuplement forestier, la maladie aura un impact bien plus faible sur leurs croissances.
Pour étudier la résistance du frêne à la chalarose, l’Inra dispose d’un réseau de 15 parcelles expérimentales. Plusieurs milliers d’arbres de plus de 100 provenances françaises et européennes permettent d’étudier la variabilité de l’espèce pour la sensibilité à la maladie, mais également la part de la génétique, l’héritabilité, dans l’expression et la transmission de ce caractère. « Notre travail consiste à mesurer la fréquence des arbres génétiquement tolérants, souligne Benoit Marçais de l’IaM. Ce sont les arbres qui montrent peu de symptômes. Ils sont affectés au niveau des feuilles mais le chalara ne passe pas dans les rameaux et ne provoque pas de dépérissement. Ce sont des porteurs sains. » Les premiers résultats obtenus sur ces dispositifs sont encourageants. Ils montrent que, malgré les faibles taux d’individus indemnes ou suffisamment résistants, un programme de création variétale de frênes résistants est envisageable. « Nous avons besoin d’acquérir et développer les connaissances et les outils nécessaires à l’hybridation et à la multiplication végétative du frêne, conclut Arnaud Dowkiw, généticien forestier. Nous étudions le système de reproduction du frêne commun avec l’université de Lille et nous avons récemment fait des découvertes majeures à ce sujet. Nous travaillons en partenariat avec les pépiniéristes sur la multiplication végétative du frêne par greffage et (plus difficile) par bouturage. »