Une expertise scientifique collective sur l’artificialisation des sols montre que la limitation de cette artificialisation doit également s’accompagner d’outils pour en réduire les impacts.
Les sols sont des ressources non renouvelables et leur artificialisation est aujourd’hui considérée à la fois comme l’un des principaux facteurs d’érosion de la biodiversité et comme une perte nette de ressource pour l’agriculture et les espaces boisés et naturels. L’Institut national de la recherche agronomique (Inra) et l’Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux (Ifsttar) ont livré le 8 décembre 2017 une expertise scientifique sur cette problématique. Les sols artificialisés comprennent toutes les terres non agricoles, non forestières et non naturelles. Ainsi, les terres supportant les villes, les logements, les activités économiques (exceptées l’agriculture et la sylviculture), sont considérées comme artificialisées. Plus précisément, l’artificialisation traduit deux phénomènes : l’imperméabilisation du sol et l’urbanisation. La première, qui se produit avec des surfaces bâties, des routes, des parkings, conduit à une perte du sol irréversible : « la biodiversité souterraine et aérienne est affectée par la perte d’habitats naturels, la banalisation et la contamination des milieux et la fragmentation de l’espace, explique l’Inra dans un communiqué. La structure du sol est elle aussi détruite ». Mais, dans le cas de l’urbanisation, ces impacts peuvent être atténués par les espaces verts, les jardins, les façades ou encore les toitures végétalisées, au sein du tissu urbain. Mais quoi qu’il en soit, « la biodiversité est modifiée : les espèces spécialistes (auxquelles appartient la biodiversité remarquable) disparaissent au profit d’espèces plus généralistes, voire invasives. »
La méthode pour mesurer l’artificialisation ne fait pas consensus, et selon celle choisie, la surface artificialisée en France est estimée en 2014 entre 5,6% et 9,3%. Près de la moitié des surfaces artificialisées entre 2006 et 2014 l’ont été pour de l’habitat, qui couvre en 2014 plus de 40 % des sols artificialisés. Pour limiter l’expansion des sols artificialisés tout en satisfaisant les besoins des sociétés humaines en logement, en zones économiques et en infrastructures de transport, l’expertise entrevoit plusieurs leviers d’action : limiter l’extension des surfaces artificialisées, réduire les impacts pour limiter les effets négatifs et compenser l’artificialisation. Et pour ces leviers, elle propose plusieurs outils d’action. « L’outil majeur est la planification urbaine et l’aménagement du territoire, explique l’Inra. Les outils fiscaux tels que les taxes jouent aussi un rôle important dans les dynamiques de l’artificialisation des sols. La densification des villes pourrait être un levier pour limiter la périurbanisation résultant d’un étalement urbain diffus et discontinu qui est une forte source d’artificialisation des sols. La réhabilitation des espaces vacants, des friches industrielles au sein des espaces déjà urbanisés serait un levier efficace de réponse à la demande de logements ou d’espaces productifs et, porteur de services pour les quartiers alentour. »