En Europe, chacun est invité à contribuer aux études menées sur le frelon asiatique et le papillon Vulcain
Les sciences participatives ont le vent en poupe. En témoignent les 50 millions d’observations d’animaux récoltées à l’échelle nationale sur les carnets virtuels du programme VisioNature, piloté par la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO), qui fournissent une base de données précieuse aux associations de protection de la nature. Mais l’Europe n’est pas en reste non plus et met actuellement à l’honneur deux insectes à travers des programmes de suivis participatifs : le frelon asiatique (Vespa velutina) et le papillon Vulcain (Vanessa atalanta). Le premier est une espèce invasive que chercheurs et décideurs tentent de réguler, le second effectue des migrations annuelles que les entomologistes souhaitent mieux comprendre.
Depuis son introduction accidentelle en France vers 2004, le frelon asiatique a connu une expansion fulgurante. on en recense aujourd’hui plusieurs dizaines de milliers sur l’ensemble du territoire. L’envahisseur a atteint les pays frontaliers : Espagne, Italie, Royaume Uni, Belgique. Il vient s’ajouter au cortège de fléaux qui menacent les abeilles, et inquiète grandement les apiculteurs. Pour cause, son éradication est désormais devenue illusoire. La lutte se concentre sur les moyens de freiner son expansion et réguler la densité de ses populations. Ainsi l’unité Santé et Agroécologie du Vignoble (Save) de l’Inra de Bordeaux, tout en analysant la biologie et le comportement des frelons à l’aide de puces de radio-identification RFID, a initié « Eurofrelon », un projet de recherche participative à échelle européenne, en partenariat avec le CNRS de Toulouse. Grâce à la capture de fondatrices partout en Europe, ils souhaitent comprendre les adaptations génétiques et morphologiques (taille, poids, taille des ailes etc…) qui changeraient leur vitesse de vol et favoriseraient leur expansion. Les résultats de cette étude permettront de mieux caractériser les populations suivant leur environnement, et d’ainsi mieux comprendre et suivre l’invasion, dans le but de mettre en place des stratégies de régulation adaptées, mais également de mieux anticiper leur expansion. Concrètement, le public peut contribuer à l’étude en identifiant et en piégeant des reines de frelons de Mars à Mai 2017 et en les transmettant ensuite aux chercheurs qui les étudieront.
Le papillon Vulcain, quant à lui, n’inquiète pas tant les chercheurs. Au contraire, ils aimeraient bien en savoir plus sur ses migrations. Chaque année, au printemps, il colonise l’Europe centrale et l’Europe du nord depuis le sud. En automne, la génération engendrée par les arrivées printanières migre retourne vers le sud, entraînant des mouvements spectaculaires de dizaines de milliers de papillons. Grâce à plus de 40 portails européens de sciences participatives partageant leurs données, le groupe de recherche «Migration et Écologie des Insectes» de l’Université de Berne, en Suisse, rassemble les observations de Vulcains récoltées par des milliers d’observateurs amateurs ou professionnels au travers de l’Europe. Cette richesse de données permettra non seulement de mieux comprendre l’occurrence et la phénologie du Vulcain, mais aussi d’étudier l’influence d’un environnement variable et d’un climat changeant. Les chercheurs veulent également explorer les routes de migration majeures et leur impact potentiel sur les écosystèmes qu’elles traversent. En prenant le Vulcain comme modèle, ils espèrent aussi tirer des conclusions plus générales qui pourraient être applicables à la compréhension du comportement d’autres insectes migrateurs, tel les ravageurs de cultures, importants sur le plan économique.