Huile de palme : la volte-face de l’Assemblée nationale (2 mn)

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Adoptés en Commission du développement durable, plusieurs amendements au projet de loi de finances 2019, qui visaient à supprimer des niches fiscales favorables à l’huile de palme, ont été rejetés en séance plénière.

Par un tête-à-queue spectaculaire, le président de la commission des finances de l’Assemblée nationale, le député LaRem Joël Giraud, a donné un avis défavorable à un amendement… dont il était lui-même le premier signataire ! L’exposé des motifs de cet amendement était pourtant parfaitement clair : « L’extension des plantations de palmier à huile constitue une cause majeure de déforestation, et de dégradation des écosystèmes, dans les pays du Sud. Depuis plusieurs années, la consommation d’huile de palme est en hausse croissante dans les carburants. Les systèmes de certification actuels sont reconnus comme insuffisant et surtout ne permettent pas d’éliminer les changements d’affectation des sols indirects (CASI) causés par l’augmentation de cette pression foncière. Si l’effet CASI était pris en compte de façon effective dans le bilan gaz à effet de serre, les biocarburants à base d’huile de palme seraient les plus nocifs pour le climat. Notre amendement propose d’exclure nommément l’huile de palme (HVO). C’est par là aller vers une bien plus grande cohérence en la matière, comme de façon générale la Cour des comptes y invite dans son rapport public de 2016 qui promeut une approche stratégique dans les biocarburants, après son rapport thématique de 2012. Cette suppression de niche fiscale infondée pourra par ailleurs générer des crédits supplémentaires qui pourront en seconde partie du PLF être réalloués (développement des pratiques agri- écoresponsable; aide à la conversion des acteurs orientés vers l’huile de palme) » Cet exposé des motifs n’a pourtant pas convaincu le gouvernement, qui a combattu cet amendement et tous ceux de même nature déposés par les députés. Greenpeace a vivement réagi à cette volte-face de la représentation nationale : « En rejetant l’amendement visant à mettre un terme aux avantages fiscaux dédiés aux agrocarburants à base d’huile de palme, le gouvernement donne une nouvelle preuve flagrante de son mépris pour l’enjeu climatique.Quelques semaines après la publication du dernier rapport du GIEC, qui pointe l’importance cruciale des forêts tropicales pour la préservation du climat, cette décision dépasse l’entendement.Il y avait pourtant une réelle motivation parlementaire, au-delà des clivages politiques, de mettre un terme à cette hérésie fiscale, destructrice pour l’environnement, et d’en finir avec la surconsommation d’huile de palme en France, une des causes principales de la déforestation. Le bilan de presque un an de travail gouvernemental contre la déforestation importée en France se résume donc pour l’instant à la seule ouverture du site de la Mède qui va augmenter les importations françaises d’huile de palme de près de 64%. Que l’Elysée, par la voix de Gérald Darmanin, invoque les intérêts du site de la Mède pour justifier le rejet de l’amendement prouve que ce n’est pas Emmanuel Macron qui gouverne la politique industrielle de ce pays, mais des grands groupes sans scrupules, comme Total. Pas plus tard qu’hier, François de Rugy déclarait que ce n’était pas la politique de la France de développer l’huile de palme.Il devient désormais impossible d’accorder une quelconque crédibilité à la parole gouvernementale sur l’environnement ».