Mieux connaître l’impact des pesticides et diminuer l’utilisation des substances préoccupantes: le gouvernement a détaillé la semaine dernière son plan d’action pour réduire la dépendance de l’agriculture aux produits phytosanitaires, qui a été fraîchement accueilli par les organisations environnementales comme par les agriculteurs.
Au niveau européen, « ce plan prévoit très clairement de s’opposer à toute prolongation, ou toute nouvelle ré-autorisation, premièrement de substances cancérogènes de catégories 1 (les plus dangereuses NDLR), les substances de catégorie 1 dites mutagènes, les substances toxiques pour la reproduction de catégorie 1, et tous les perturbateurs endocriniens », a déclaré à l’AFP le ministre de la Transition écologique, Nicolas Hulot. Annoncé dans le cadre des Etats généraux de l’alimentation (EGA), ce plan contient de multiples mesures, dont certaines ont déjà été lancées. Le projet de loi Alimentation actuellement en discussion à l’Assemblée nationale comprend ainsi déjà des dispositions relatives à la séparation de la vente et du conseil sur les produits phytopharmaceutiques. Le gouvernement a prévu d’utiliser en partie un grand plan d’investissement de 5 milliards d’euros pour l’agriculture, promis durant sa campagne
présidentielle par Emmanuel Macron, pour « accompagner la transformation des
systèmes de production, la construction et la diffusion d’alternatives aux produits phytopharmaceutiques », ont précisé mercredi les ministres de la Transition écologique, de l’Agriculture, de la Santé et de l’Enseignement supérieur, dans un communiqué commun. Des dispositions législatives seront également prises pour « réduire les risques concernant les riverains des zones agricoles liés à l’utilisation de produits à proximité des lieux d’habitation ».
Le gouvernement va également renforcer le plan Ecophyto 2, qui ambitionne de réduire l’utilisation des pesticides et d’encourager la production raisonnée, pour « améliorer sa gouvernance et son fonctionnement. Les premiers plans Ecophyto n’ont pas rempli les objectifs qu’ils s’étaient donnés, pourtant il y a eu un certain nombre de moyens mis à
disposition. Il faut en tirer les leçons », a expliqué M. Hulot.
Parallèlement, la recherche sera renforcée pour offrir aux agriculteurs un panel de méthodes alternatives, avec notamment un soutien accru aux produits de biocontrôle, qui luttent contre les nuisibles en recourant à des organismes vivants comme les insectes ou des substances naturelles comme les phéromones. « L’idée est de mettre la priorité sur le biocontrôle. Concrètement, ça veut dire qu’on va accompagner, simplifier, réduire les délais pour les solutions de biocontrôle et les substances de base pour qu’elles puissent arriver dans un délai très court sur le marché », a détaillé M. Hulot. Par ailleurs, la redevance pour pollutions diffuses sera modernisée, progressivement renforcée, et davantage modulée pour mieux tenir compte de la dangerosité des produits. Ses recettes, estimées à environ 50 millions d’euros à compter de 2019, contribueront à financer l’accompagnement des agriculteurs, dans le cadre du plan Ecophyto et de la conversion à l’agriculture biologique. « Comment compliquer encore la situation des agriculteurs ?, s’est demandé dans un communiqué la Coordination rurale, dénonçant l’augmentation des contraintes pour les agriculteurs avec pour conséquence une nouvelle baisse de leur revenu déjà calamiteux ». La FNSEA, premier syndicat agricole français, a critiqué « des charges et encore des charges, des interdictions et encore des interdictions, tout cela sans réelle concertation, sans réelle consultation! (…) Nous sommes prêts à progresser mais pour cela, il faut des agriculteurs debout, pas des exploitations à genoux! ». « Où est passé le plan de +sortie+ des pesticides réclamé par le Président de la République ? », s’est pour sa part demandé la Confédération paysanne. L’association écologiste Générations futures a aussi estimé dans un communiqué que « le compte n’y est pas, évoquant des intentions positives, mais dont les détails ne sont pas connus, et de nombreux points très décevants ». La Fondation pour la Nature et l’Homme (ex-Fondation Hulot) a en revanche félicité le gouvernement sur Twitter pour ce qu’elle qualifie de « plan pesticide prometteur ».