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Alors que des pêcheurs siciliens protestent contre l’opportunisme des dauphins qui dépouillent leurs filets, une association française alerte sur le nombre de cétacés tués par la pêche accidentelle en Atlantique.

Des pêcheurs italiens ont annoncé mercredi leur intention de se mettre en grève pendant deux jours pour protester contre la concurrence des dauphins dans les eaux de la Méditerranée. Ces pêcheurs, originaires des îles Lipari et Salina, au large de la Sicile, ont expliqué aux médias italiens que les dauphins avaient de plus en plus de difficultés à trouver leur ration de calamars ou de poisson et qu’ils avaient commencé à s’en prendre à leurs filets. Les dauphins ont vite compris qu’il valait mieux surveiller les bateaux de pêche et attaquer leurs filets à coups de dents lorsqu’ils étaient remplis, selon ces témoignages.

Selon ces pêcheurs, leurs prises ont diminué de quelque 70% depuis l’arrivée des dauphins. « C’est une situation intenable, chaque nuit, nous nous battons en mer pour notre survie », a affirmé Giuseppe Spinella, vice-président de l’association de ces pêcheurs qui regroupe 119 bateaux enregistrés dans les Iles Eoliennes. Nous n’avons rien contre les dauphins, mais c’est eux ou nous, et nous devons trouver une solution », a-t-il ajouté, cité par le journal La Repubblica.

Dans le même temps, en France, près de 800 dauphins se sont échoués sur la côte atlantique après les tempêtes de février et mars, morts après avoir été capturés accidentellement par des bateaux de pêche, un record, a alerté vendredi l’observatoire Pelagis. « La situation est extrêmement préoccupante et nous tirons la sonnette d’alarme sur les perspectives de conservation du dauphin commun sur la façade atlantique, une espèce qui se reproduit lentement, a déclaré à l’AFP Hélène Peltier de l’Observatoire Pelagis de La Rochelle, spécialisé dans la conservation des mammifères et oiseaux marins. Des phénomènes de pic d’échouages par capture accidentelle, et ensuite des forts vents d’ouest qui ramènent les carcasses à la côte, on en a déjà connus (…) Mais cette année, on a eu 800 échouages de dauphins communs en un peu plus d’un mois. C’est exceptionnel! »

Selon un communiqué de Pelagis, « le phénomène actuel correspond à plus de 30 fois le niveau normal d’échouages sur nos côtes. Des échouages de mammifères marins sont observés tout au long de l’année, environ 200 à 500 échouages de dauphins sont enregistrés par an » en temps normal. Lors d’un précédent pic d’échouages, en 1997, plus de 700 carcasses avaient été recensées au cours des trois premiers mois de l’année. L’observatoire Pelagis, rattaché à l’Université de la Rochelle et au CNRS et qui coordonne le Réseau national échouages (RNE) regroupant 300 correspondants, a recensé cet « effectif record » après les tempêtes Leiv, Marcel et Zeus. Ce ne sont toutefois pas ces tempêtes hivernales qui ont causé la mort des cétacés, insiste Pelagis dans son communiqué. « Elles ont juste ramené les carcasses à la côte (…) Plus de 90% des animaux examinés présentaient des traces de capture accidentelle dans les engins de pêche (traces de maillage, fractures, amputations des nageoires) », précise-t-il.

« Des exercices de modélisation ont permis d’identifier les zones probables de mortalité en mer, et d’estimer le nombre total d’animaux morts en mer. L’estimation basse serait de 3.500 dauphins morts depuis le début de l’année, avertissent les chercheurs. Il est illusoire de fixer un objectif de zéro capture accidentelle » mais il faut au moins les limiter à un niveau permettant « le maintien des populations de dauphins. »

L’observatoire, qui souhaite que des propositions puissent être élaborées en collaboration avec la profession. Des pistes, notamment technologiques (engins modifiés, répulsifs acoustiques) existent pour réduire le risque de capture accidentelle, mais « aujourd’hui aucun programme de limitation de ces captures n’est financé », déplore Pelagis.